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Ariane Web: Conseil d'État 342102, lecture du 13 août 2010, ECLI:FR:CEORD:2010:342102.20100813

Décision n° 342102
13 août 2010
Conseil d'État

N° 342102
ECLI:FR:CEORD:2010:342102.20100813
Inédit au recueil Lebon

CARBONNIER, avocats


Lecture du vendredi 13 août 2010
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la requête, enregistrée le 2 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 10 août 2010, présentés pour M. Ibrahim A, agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de son enfant mineur, demeurant ... ; M. Ibrahim A demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 7 juillet 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer, ainsi qu'à son fils, un passeport et une carte d'identité ;

2°) d'enjoindre au préfet de police de le convoquer pour lui délivrer, ainsi qu'à son fils, un passeport et une carte nationale d'identité dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 600 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


il soutient que l'ordonnance attaquée est irrégulière en la forme ; qu'elle est entachée d'un défaut de motifs et de réponse à conclusions ; que le juge des référés du tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit en considérant que l'administration n'avait pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale en refusant de lui délivrer, ainsi qu'à son fils, une carte d'identité française et un passeport ; qu'en effet, le juge a dénaturé les faits et les documents qui lui étaient soumis puisque le requérant avait produit un certificat de nationalité ainsi que plusieurs cartes d'électeur ; que l'arrêt de la cour d'appel n'a pas été signifié à son épouse et que l'arrêt de la Cour de cassation qui a rejeté son pourvoi ne lui a pas été non plus signifié ; que ces décisions de justice ne lui sont donc pas opposables ;


Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil, notamment son article 30 ;

Vu le décret n° 55-1397 du 22 octobre 1955 instituant la carte nationale d'identité ;

Vu le décret n° 2000-1277 du 26 décembre 2000 portant simplification des formalités administratives ;

Vu le décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 relatif aux passeports ;

Vu le code de justice administrative ;



Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience publique lorsqu'il est manifeste, au vu de la demande, qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en compte les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier de première instance que M. A a sollicité en 2003 le renouvellement de son passeport ; que le préfet de police a refusé de délivrer ce passeport au motif que le tribunal de grande instance de Bobigny a annulé, par jugement du 16 septembre 1997, la déclaration de nationalité française souscrite par M. A le 24 novembre 1986 et constaté son extranéité ; que ce jugement a été confirmé par la cour d'appel de Paris le 4 février 1999 ; que la Cour de cassation a rejeté, par un arrêt du 26 juin 2001, le pourvoi formé contre cet arrêt par M. A ; qu'enfin le tribunal de grande instance de Paris a, par jugement du 6 juin 2008, jugé irrecevable la demande de reconnaissance de validité de sa déclaration de nationalité présentée par le requérant ; que le juge des référés du tribunal administratif de Paris a pu déduire de ces décisions de l'autorité judiciaire que l'administration n'avait pas porté d'atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale en se fondant, pour refuser de lui délivrer, ainsi qu'à son fils, un passeport et une carte d'identité, sur le fait que, contrairement à ses prétentions, M. A ne justifiait pas de la nationalité française ; que la circonstance que les décisions en cause de l'autorité judiciaire n'auraient pas pu être régulièrement signifiées est à cet égard sans incidence ; qu'il est, en conséquence, manifeste que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui est suffisamment motivée et qui n'est entachée d'aucune irrégularité ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter son appel, y compris ses conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code ;



O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Ibrahim A.
Copie pour information en sera transmise au préfet de police.