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Ariane Web: Conseil d'État 242794, lecture du 6 septembre 2002, ECLI:FR:CESJS:2002:242794.20020906

Décision n° 242794
6 septembre 2002
Conseil d'État

N° 242794
ECLI:FR:CESJS:2002:242794.20020906
Inédit au recueil Lebon
3 SS
Mme Burguburu, rapporteur
M. Austry, commissaire du gouvernement


Lecture du 6 septembre 2002
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 et 15 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Richard X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Marseille, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, a déclaré l'intéressé inéligible aux fonctions de conseiller municipal pour une durée d'un an à la suite des élections municipales qui se sont déroulées le 11 mars 2001 dans la commune de Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône) ;
2°) de le relever de son inéligibilité et de ne pas prononcer sa démission d'office ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Burguburu, Conseiller d'Etat ;
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-4 du code électoral : "Pendant l'année précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où l'élection a été acquise, un candidat à cette élection ne peut recueillir des fonds en vue du financement de sa campagne que par l'intermédiaire d'un mandataire désigné par lui, qui est, soit une association de financement électorale, soit une personne physique dénommée "le mandataire financier"./ Lorsque le candidat a décidé de recourir à une association de financement électorale ou à un mandataire financier, il ne peut régler les dépenses occasionnées par sa campagne électorale que par leur intermédiaire ( ...)" ; qu'aux termes de l'article L. 52-12 du même code : "Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu par l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle, par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4 ( ...). Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter de déficit. Dans les deux mois qui suivent le tour de scrutin où l'élection a été acquise, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la préfecture son compte de campagne et ses annexes, présentés par un membre de l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés et accompagnés de justificatifs de ses recettes ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte ( ...). Le compte de campagne et ses annexes sont transmis à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques" ; qu'aux termes de l'article L. 52-15 : "Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection" ; qu'aux termes de l'article L. 118-3 : "Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales./ Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie, ou relever le candidat de cette inéligibilité"; qu'enfin, aux termes de l'article L. 234 applicable aux élections municipales : "Peut être déclaré inéligible pendant un an celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et délais prescrits à l'article L. 52-12 et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X..., candidat à l'élection qui s'est déroulées le 11 mars 2001 dans la commune de Bouc-Bel-Air en vue de la désignation des conseillers municipaux a, ainsi qu'il le reconnaît lui-même, réglé directement après le scrutin plusieurs factures représentant près de la moitié de ses dépenses de campagne, d'un montant total de 44 376 F, sans le recours au compte ouvert au nom de son mandataire financier, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-4 qui instituent une formalité substantielle à laquelle il ne peut être dérogé ; que c'est dès lors à bon droit que la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne ;
Considérant que M. X... fait valoir que c'est faute d'avoir prévu que son élection interviendrait au premier tour de scrutin qu'il a laissé son compte de campagne en situation déséquilibrée à cette date et n'a effectué qu'ensuite les versements permettant de régler les dépenses antérieurement engagées ; qu'il invoque ainsi les erreurs commises par son mandataire financier ainsi que les difficultés supplémentaires auxquelles il a été confronté pour gérer son compte de campagne en raison de sa candidature à une autre élection concomitante ; qu'en tout état de cause, eu égard au caractère substantiel et dénué d'ambiguïté des dispositions méconnues et compte tenu du montant élevé des dépenses réglées directement par l'intéressé après le scrutin, ces seules circonstances ne permettent pas à M. X... de prétendre au bénéfice des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 118-3 du code électoral qui laissent au juge, dans certaines circonstances, la faculté de ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'a déclaré inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d'un an et déclaré démissionnaire d'office ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Richard X..., à Mme Sandrine Y..., à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, à M. François Z... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


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