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Ariane Web: Conseil d'État 336406, lecture du 17 décembre 2010, ECLI:FR:CESSR:2010:336406.20101217

Décision n° 336406
17 décembre 2010
Conseil d'État

N° 336406
ECLI:FR:CESSR:2010:336406.20101217
Inédit au recueil Lebon
9ème et 10ème sous-sections réunies
M. Martin, président
M. Matthieu Schlesinger, rapporteur
M. Collin Pierre, rapporteur public
SCP ORTSCHEIDT, avocats


Lecture du vendredi 17 décembre 2010
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le mémoire, enregistré le 28 octobre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présenté pour M. Jacques A, demeurant ..., en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; M. A demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt n° 08PA01761 du 4 décembre 2009 de la cour administrative d'appel de Paris, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 1728 du code général des impôts en ce qu'il prévoit une majoration de 40 % du montant des droits mis à la charge du contribuable lorsqu'il n'a pas été remédié au défaut de production d'une déclaration ou d'un acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 décembre 2010, présentée pour M. A ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction issue de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matthieu Schlesinger, Auditeur,

- les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Ortscheidt, avocat de M. A ;


Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant que l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987, prévoit que la majoration prévue au 1. de cet article est portée à 40 % lorsque le document mentionné au même 1. n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai ; que cette disposition est applicable au présent litige et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dont découlent les principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;


D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction issue de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987, en tant qu'il prévoit une majoration de 40 %, est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur le pourvoi de M. A jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jacques A, au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement et au Premier ministre.