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Ariane Web: Conseil d'État 350458, lecture du 30 décembre 2011, ECLI:FR:CESSR:2011:350458.20111230

Décision n° 350458
30 décembre 2011
Conseil d'État

N° 350458
ECLI:FR:CESSR:2011:350458.20111230
Mentionné aux tables du recueil Lebon
1ère et 6ème sous-sections réunies
M. Jean Lessi, rapporteur
Mme Maud Vialettes, rapporteur public
SCP ROGER, SEVAUX ; FOUSSARD, avocats


Lecture du vendredi 30 décembre 2011
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi, enregistré le 29 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. A... B..., demeurant..., ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1108582/9 du 16 mai 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande, présentée au titre de l'article L. 521-2 du même code, tendant à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et à ce qu'il soit enjoint au service de l'aide sociale à l'enfance du département de Paris de le prendre en charge dans le délai de 24 heures, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur,

- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. B...et de Me Foussard, avocat du département de Paris,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. B...et à Me Foussard, avocat du département de Paris ;




Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ;

Considérant qu'un mineur non émancipé ne dispose pas, en principe, de la capacité pour agir en justice ; qu'une demande qui n'est pas introduite par une personne habilitée à le représenter est, par suite, irrecevable ; que, pour rejeter comme irrecevable, en application des dispositions de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, la demande présentée par M. B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-2 du même code et tendant, d'une part, à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au département de Paris de le prendre en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance, le juge des référés du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la circonstance qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne conférait à un mineur la capacité à agir devant la juridiction administrative sans représentant légal ou mandataire spécialement habilité ; qu'en lui opposant cette incapacité, en l'absence de circonstances particulières justifiant que, eu égard à son office, le juge des référés saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ordonne une mesure à ce titre, l'auteur de l'ordonnance attaquée n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'au demeurant, les dispositions de l'article 375 du code civil autorisent le mineur à solliciter directement de l'autorité judiciaire que soient prononcées, le cas échéant, les mesures d'assistance éducative que sa situation nécessite ;

Considérant, par ailleurs, que le juge des référés pouvait, sans entacher son ordonnance d'irrégularité, relever cette irrecevabilité d'office sans inviter préalablement M. B...à régulariser sa demande dès lors qu'en vertu de l'article R. 522-2 du code de justice administrative les dispositions de l'article R. 612-1 du même code, qui imposent au juge d'inviter l'auteur de conclusions entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours à les régulariser, ne sont pas applicables au juge des référés statuant en urgence ;

Considérant, enfin, que si le juge des référés a mentionné dans son ordonnance, à titre de simple comparaison, les dispositions de l'article L. 221-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux mineurs maintenus en zone d'attente, il n'en a nullement fait application à M.B... ; que, par suite, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que le juge des référés aurait commis une erreur de droit en faisant application de cet article ; que les énonciations en cause revêtant un caractère surabondant, le moyen tiré de ce que le juge des référés aurait commis une erreur de droit dans l'interprétation de cet article est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. B...doit être rejeté, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité, y compris en ce qu'il comporte des conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions présentées par le département de Paris à ce même titre et dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie dans cette instance, ne peuvent qu'être rejetées, nonobstant la circonstance que M. B...a obtenu l'aide juridictionnelle, dès lors que si, dans une telle hypothèse, l'article 42 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit que le juge peut laisser une partie des dépens à la charge de l'Etat, l'article 75 de la même loi ne prévoit pas une telle faculté pour les frais qui ne sont pas compris dans les dépens ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au département de Paris.
Copie en sera adressée pour information au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.





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