Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 363749, lecture du 30 janvier 2013, ECLI:FR:CESSR:2013:363749.20130130

Décision n° 363749
30 janvier 2013
Conseil d'État

N° 363749
ECLI:FR:CESSR:2013:363749.20130130
Inédit au recueil Lebon
3ème et 8ème sous-sections réunies
M. Christian Fournier, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public
SCP ORTSCHEIDT, avocats


Lecture du mercredi 30 janvier 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu l'ordonnance n° 1208646 du 31 octobre 2012, enregistrée le 7 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la deuxième chambre du tribunal administratif de Nantes, avant qu'il soit statué sur la demande de la commune de Puyravault tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juillet 2012 par lequel le préfet de la Vendée a fixé le périmètre de la communauté de communes des Isles du Marais Poitevin à compter du 1er janvier 2013, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 septembre 2012 au greffe du tribunal administratif de Nantes, présenté pour la commune de Puyravault, en application de l'article 23-I de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 72 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christian Fournier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la Commune De Puyravault,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Ortscheidt, avocat de la Commune De Puyravault ;



1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions du II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010, dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi du 29 février 2012, que le représentant de l'Etat dans le département propose, jusqu'au 31 décembre 2012, la modification du périmètre de tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre afin de mettre en oeuvre le schéma départemental de coopération intercommunale établi en application de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales ; qu'en l'absence de schéma départemental, le représentant de l'Etat dans le département peut proposer une modification de périmètre de tout établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre sous réserve du respect des objectifs et de la prise en compte des orientations que mentionne l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale ; que le représentant de l'Etat dans le département peut également proposer une modification de périmètre ne figurant pas dans ce schéma, sous la même réserve et après avis de la même commission ; que la modification de périmètre proposée peut concerner des communes appartenant ou non à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ; que l'arrêté de projet de périmètre pris par le représentant de l'Etat dans le département dresse la liste des communes concernées en tenant compte, le cas échéant, des propositions de modification adoptées, dans les conditions de majorité prévues par l'article L. 5210-1-1, par la commission départementale de la coopération intercommunale ; que les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et les conseils municipaux concernés disposent d'un délai de trois mois pour se prononcer sur le projet de périmètre ; que la modification de périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est prononcée par arrêté du représentant de l'Etat dans le département après accord des conseils municipaux des communes qui sont incluses dans le projet de périmètre ; que cet accord est exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse si cette dernière représente au moins le tiers de la population totale ; qu'à défaut d'accord des communes, le représentant de l'Etat dans le département peut, jusqu'au 1er juin 2013, par décision motivée, modifier le périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre en tenant compte des propositions de modification adoptées, dans les conditions de majorité prévues au quatrième alinéa du IV de l'article L. 5210-1-1, par la commission départementale de la coopération intercommunale, qui est obligatoirement consultée ; que l'arrêté de modification du périmètre pris par le représentant de l'Etat dans le département emporte retrait des communes auxquelles le périmètre est étendu des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elles sont membres ;

3. Considérant que la commune de Puyravault soutient que les dispositions du II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 rappelées ci-dessus, en ce qu'elles permettent au représentant de l'Etat dans le département d'intégrer une commune dans un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre contre son avis, notamment dans le cas où elle a exprimée sa volonté de rejoindre un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, portent atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales énoncé à l'article 72 de la Constitution ;

4. Considérant que ces dispositions sont applicables au présent litige au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ; qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'elles portent atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;



D E C I D E :
--------------
Article 1er : La question de la conformité à la Constitution du II de l'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Puyravault et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Premier ministre et au tribunal administratif de Nantes.



Voir aussi