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Ariane Web: Conseil d'État 355839, lecture du 26 novembre 2013, ECLI:FR:CESJS:2013:355839.20131126

Décision n° 355839
26 novembre 2013
Conseil d'État

N° 355839
ECLI:FR:CESJS:2013:355839.20131126
Inédit au recueil Lebon
3ème sous-section jugeant seule
Mme Anne Egerszegi, rapporteur
Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public
SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, avocats


Lecture du mardi 26 novembre 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 janvier et 16 avril 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Bellentre (73210), représentée par son maire ; la commune de Bellentre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1002787 du 10 novembre 2011, en tant que par celui-ci, le tribunal administratif de Grenoble, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions de M. B...à fin d'annulation de l'arrêté n° 53-10 du 17 juin 2010 le plaçant en disponibilité d'office, a annulé l'arrêté n° 52-10 du 17 juin 2010 fixant au 20 juin 2010 le terme de son congé de maladie ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M.B... ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'article 57 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la Commune de Bellentre et à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de M. B...A...;



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...B..., gardien de police municipale de la commune de Bellentre, a été victime d'un accident de service le 24 janvier 2009 et a été placé en congé de maladie jusqu'au 4 février 2009 avec prolongation jusqu'au 11 mars 2009, date à laquelle il a repris son service ; que le 19 mars 2009, M. B... a été à nouveau placé en congé pour accident de service jusqu'au 14 août 2009 ; que le 8 septembre 2009, la commission de réforme, saisie par le maire de la commune, a émis un avis favorable à la reprise des activités professionnelles de l'intéressé et fixé la date de consolidation des blessures au 20 juin 2009 ; que, par un arrêté du 21 septembre 2009, le maire de la commune a placé M. B... en position de congé de maladie ordinaire du 21 juin 2009 au 15 octobre 2009 ; que, le 8 avril 2010, la commission de réforme, statuant sur l'appel de l'intéressé, a émis l'avis que la reprise du travail n'était pas envisageable dans le poste habituel de M.B... ; que le maire de la commune a proposé à deux reprises un aménagement de son poste de travail à l'intéressé qui a refusé ces propositions ; que, par deux arrêtés du 17 juin 2010, le maire de la commune de Bellentre a placé M. B...en congé de maladie jusqu'au 20 juin 2010 puis en disponibilité d'office à compter de cette date ; que, le 28 juin 2010, M. B...a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ; que, par jugement en date du 10 novembre 2011, contre lequel la commune de Bellentre se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Grenoble a dit qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté n° 53-10 plaçant M. B...en disponibilité d'office et annulé l'arrêté n°52-10 en tant qu'il fixe au 20 juin 2010 le terme du congé de maladie de M.B... ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / 1° A un congé annuel avec traitement dont la durée est fixée par décret en Conseil d'Etat. / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...). Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un agent victime d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions a le droit d'être maintenu en congé de maladie ordinaire, avec bénéfice de son plein traitement, sans autre limitation que celles tenant à sa mise à la retraite ou au rétablissement de son aptitude au service ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commission de réforme a, dans son avis du 8 avril 2010, estimé qu'une reprise du travail n'était pas envisageable pour M. B...dans son poste habituel et que le maire a tiré les conséquences de cet avis en proposant à ce dernier deux adaptations successives de son poste de travail que l'intéressé a refusées ; que, toutefois, ce n'est que le 6 juillet 2010, à la demande du maire, que la commission de réforme s'est à nouveau prononcée sur les aménagements proposés et sur l'aptitude au travail de M.B... ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté litigieux, soit le 17 juin 2010, l'aptitude de M. B...à reprendre son service n'était pas établie ; que, dès lors, en jugeant, après avoir relevé qu'il n'était pas contesté que M. B...n'était pas en état, à cette date, de reprendre ses fonctions, que le maire de la commune de Bellentre ne pouvait légalement fixer le terme du congé de maladie à l'expiration d'une année à compter de la date de consolidation des séquelles de l'accident de service et en déduisant que l'arrêté litigieux devait être annulé en tant qu'il fixait au 20 juin 2010 le terme du congé de maladie de l'intéressé, le tribunal administratif de Grenoble n'a ni commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier ; que, par suite, la commune de Bellentre n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bellentre la somme de 3 000 euros à verser à M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la commune de Bellentre est rejeté.

Article 2 : La commune de Bellentre versera à M. B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Bellentre et à M. A...B....