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Ariane Web: Conseil d'État 378093, lecture du 16 juillet 2014, ECLI:FR:CESJS:2014:378093.20140716

Décision n° 378093
16 juillet 2014
Conseil d'État

N° 378093
ECLI:FR:CESJS:2014:378093.20140716
Inédit au recueil Lebon
2ème sous-section jugeant seule
Mme Airelle Niepce, rapporteur
M. Xavier Domino, rapporteur public


Lecture du mercredi 16 juillet 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Voulpaix, représentée par son maire en exercice ; la commune de Voulpaix demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2014-202 du 21 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de l'Aisne, en tant qu'il rattache la commune de Voulpaix au canton de Marle ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de prendre un décret rattachant la commune de Voulpaix au canton de Vervins ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Airelle Niepce, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public ;




1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 191-1 du code électoral, résultant de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral : " Le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair. / Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants " ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la même loi, applicable à la date du décret attaqué : " I. - Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil général qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. (...)/ III. - La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes :/ a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ;/ b) Le territoire de chaque canton est continu ;/ c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants ;/ IV. - Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques (...) ou par d'autres impératifs d'intérêt général " ;

3. Considérant que le décret attaqué a, sur le fondement de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, procédé à une nouvelle délimitation des cantons du département de l'Aisne, compte tenu de l'exigence de réduction du nombre des cantons de ce département de quarante-deux à vingt-et-un résultant de l'article L. 191-1 du code électoral ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait de procéder, préalablement à l'intervention du décret attaqué, à une consultation des communes du département ; que le moyen tiré de ce qu'en l'absence de consultation des maires et des conseillers municipaux des communes du département de l'Aisne, le décret attaqué aurait été adopté au terme d'une procédure irrégulière, ne peut, par suite, qu'être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales que le territoire de chaque canton doit être établi sur des bases essentiellement démographiques, qu'il doit être continu et que toute commune de moins de 3 500 habitants doit être entièrement comprise dans un même canton, seules des exceptions de portée limitée et spécialement justifiées pouvant être apportées à ces règles ; que ni ces dispositions, ni aucun autre texte non plus qu'aucun principe n'imposent au Premier ministre de prévoir que les limites des cantons, qui sont des circonscriptions électorales, coïncident avec les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale ou les limites des " bassins de vie " définis par l'Institut national de la statistique et des études économiques ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si la commune requérante critique le choix effectué par le décret attaqué de la rattacher au canton de Marle plutôt qu'à celui de Vervins, ce qui lui aurait semblé préférable, il ressort des pièces du dossier que le rattachement au canton de Marle, dont la population est inférieure de 19,35 % à la moyenne départementale, de la commune de Voulpaix, avec les communes de Lugny, Rogny et La Vallée-au-Blé, auparavant rattachées au canton de Vervins, est justifié par le respect de l'exigence tenant aux bases essentiellement démographiques de la délimitation des cantons ; qu'une telle considération, dépourvue de caractère arbitraire, permet de satisfaire à l'obligation résultant du a) du III de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Voulpaix n'est en tout état de cause pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret attaqué, en tant qu'il rattache la commune de Voulpaix au canton de Marle ;


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la commune de Voulpaix est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Voulpaix, au ministre de l'intérieur et au Premier ministre.