Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 360742, lecture du 22 septembre 2014, ECLI:FR:CESSR:2014:360742.20140922

Décision n° 360742
22 septembre 2014
Conseil d'État

N° 360742
ECLI:FR:CESSR:2014:360742.20140922
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème / 10ème SSR
M. Olivier Japiot, rapporteur
Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public
BROUCHOT, avocats


Lecture du lundi 22 septembre 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi, enregistré le 4 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre délégué, chargé du budget ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 11NT00994 du 26 avril 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé le jugement n°s 0804125, 0903444 et 1001723 du 3 février 2011 du tribunal administratif de Rennes, a déchargé le Syndicat intercantonal de répurgation du centre ouest Bretagne (SIRCOB) des cotisations de taxe professionnelle auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2008 dans les rôles de la commune de Carhaix-Plouguer (Finistère) ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Japiot, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Brouchot, avocat du Syndicat intercantonal de répurgation du centre ouest Bretagne (SIRCOB) ;


1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le Syndicat intercantonal de répurgation du centre ouest Bretagne (SIRCOB), qui a pour objet le traitement des déchets ménagers, a acheté en 2004 à la société assurant l'incinération de ceux-ci un turbo-alternateur lui permettant de produire, grâce à la combustion des déchets, de l'électricité, pour partie vendue par lui à la société EDF ; que l'administration a décidé de l'assujettir, à compter de l'année 2005, à la taxe professionnelle à raison de cette activité de production d'électricité ; que le ministre délégué, chargé du budget, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 26 avril 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé le jugement du 3 février 2011 du tribunal administratif de Rennes, a déchargé le SIRCOB des cotisations de taxe professionnelle auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2008 dans les rôles de la commune de Carhaix-Plouguer (Finistère) ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée (...) " ; qu'aux termes de l'article 1654 du même code : " Les établissements publics(...) créés sur l'ordre ou avec le concours ou sous le contrôle de l'Etat ou des collectivités locales doivent (...) acquitter, dans les conditions de droit commun, les impôts et taxes de toute nature auxquels seraient assujetties des entreprises privées effectuant les mêmes opérations " ; qu'aux termes du II de l'article 6 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité : " (...) les nouvelles installations de production sont exploitées par toute personne (...) dès lors que cette personne est titulaire d'une autorisation d'exploiter (...)/ Toutefois, les installations dont la puissance installée par site de production est inférieure ou égale à 4,5 mégawatts sont réputées autorisées sur simple déclaration préalable adressée au ministre chargé de l'énergie, qui en vérifie la conformité avec les dispositions de la présente loi " ; qu'aux termes de l'article 10 de la même loi : " (...) Electricité de France et (...) les distributeurs non nationalisés (...) sont tenus de conclure, si les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l'achat de l'électricité produite sur le territoire national par:/ 1° Les installations qui valorisent des déchets ménagers ou assimilés mentionnés aux articles L. 2224-13 et L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales ou qui visent l'alimentation d'un réseau de chaleur (...). Un décret précise les obligations qui s'imposent aux producteurs bénéficiant de l'obligation d'achat, ainsi que les conditions dans lesquelles les ministres chargés de l'économie et de l'énergie arrêtent, après avis de la Commission de régulation de l'énergie, les conditions d'achat de l'électricité ainsi produite (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1447 et 1654 précitées du code général des impôts qu'une activité exercée par un établissement public local n'est pas passible de la taxe professionnelle si cette activité ne relève pas, eu égard à son objet ou aux conditions particulières dans lesquelles elle est exercée, d'une exploitation à caractère lucratif ; qu'une activité de production d'électricité, régie notamment par les dispositions précitées du II de l'article 6 de la loi du 10 février 2000, doit être regardée, compte tenu de l'objet qui est le sien, comme lucrative, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'électricité produite puisse, le cas échéant, faire l'objet, en application des dispositions précitées de l'article 10 de la loi du 10 février 2000, d'une obligation légale d'achat ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a jugé que si l'activité de production d'électricité du SIRCOB revêtait par nature un caractère lucratif, elle ne pouvait être regardée comme exercée en concurrence avec des sociétés commerciales dont l'activité serait identique ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que cette circonstance est dépourvue d'incidence sur l'assujettissement de l'activité en litige à la taxe professionnelle ; que le ministre ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de l'erreur de droit qu'aurait commise la cour dans l'appréciation de cette circonstance ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre délégué, chargé du budget, n'est pas fondé, par le moyen qu'il invoque, à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser au SIRCOB, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :
--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre délégué, chargé du budget, est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera au Syndicat intercantonal de répurgation du centre ouest Bretagne (SIRCOB) une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et au Syndicat intercantonal de répurgation du centre ouest Bretagne (SIRCOB).


Voir aussi