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Ariane Web: Conseil d'État 366714, lecture du 30 décembre 2014, ECLI:FR:CECHS:2014:366714.20141230

Décision n° 366714
30 décembre 2014
Conseil d'État

N° 366714
ECLI:FR:CESJS:2014:366714.20141230
Inédit au recueil Lebon
1ère SSJS
M. Laurent Cytermann, rapporteur
Mme Maud Vialettes, rapporteur public
SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP FABIANI, LUC-THALER ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, avocats


Lecture du mardi 30 décembre 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par un jugement du 28 octobre 2010, le tribunal de grande instance de Toulon a sursis à statuer sur les demandes de la commune d'Ollioules (Var) en nullité de la vente d'un ensemble immobilier cadastré AM 1170 quartier du Petit Plan à Ollioules, consentie par M. B... E...à la société Cap Investissements puis par cette dernière à la société Erteco, et a invité les parties à saisir la juridiction administrative de l'appréciation de la légalité de la décision du 1er avril 2004 par laquelle le maire d'Ollioules a préempté cet ensemble immobilier et de la régularité de la notification de cette décision au notaire mandaté.

Mme H...F...veuveE..., Mme G...E...et Mme D...E..., venant aux droits de M. E...et agissant en exécution de ce jugement, ont demandé au tribunal administratif de Toulon de déclarer que cette décision est entachée d'illégalité et sa notification irrégulière.

Par un jugement n° 1100741 du 11 janvier 2013, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.




Procédure devant le Conseil d'Etat

1° Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés sous le n° 366714 les 11 mars et 11 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCP de notaires Massiani et Roquebert et M. A...Maître demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 11 janvier 2013 ;

2°) de déclarer que la décision du maire d'Ollioules du 1er avril 2004 est entachée d'illégalité et sa notification irrégulière ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Ollioules la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés sous le n° 366836 les 14 mars 2013, 17 juin 2013 et 14 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme F...et Mmes E...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 11 janvier 2013 et, subsidiairement, de le réformer ;

2°) de déclarer que tant la décision de préemption du 1er avril 2004 que la notification de cette décision au notaire instrumentaire sont entachées d'illégalité ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Ollioules la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


....................................................................................


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cytermann, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de la SCP de notaires Massiani et Roquebert et de M. Maître, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme H...F..., de Mme G...E...et de Mme D...E..., et à la SCP Fabiani, A...-Thaler, avocat de la commune d'Ollioules.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 décembre 2014, présentée pour Mme F... et MmesE....




Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de la SCP de notaires Massiani et Roquebert et de M. Maître, d'une part, et de Mmes H...F..., G...E...et D...E..., d'autre part, sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Le premier alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. ". Il résulte de ces dispositions que, pour exercer légalement le droit de préemption urbain, les collectivités titulaires de ce droit doivent justifier, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date.

3. La décision litigieuse est motivée par la volonté de la commune d'Ollioules, dans le cadre de la promotion des " métiers d'art ", de réaliser des " ateliers relais " pour poursuivre sa politique de développement artisanal au-delà de son centre ancien, de façon à permettre également l'accueil d'activités se prêtant moins bien à une localisation en centre ville. D'une part, il n'est pas contesté que la commune conduisait depuis de nombreuses années, à la date de la décision contestée, une politique d'aide à l'installation d'artisans par la mise à disposition, à des conditions avantageuses, de locaux à des entreprises artisanales. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que si la plupart des ateliers soutenus par la commune étaient installés en centre-ville, plusieurs l'étaient également en dehors de ce centre, notamment route de Sanary. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que la commune justifiait de la réalité de son projet d'action, sans qu'y fassent obstacle l'absence de production par la commune d'une délibération de son conseil municipal préalable à la décision de préemption ou d'une étude de faisabilité ni la circonstance que le terrain en cause n'avait pas été préempté à la suite d'une précédente déclaration d'intention d'aliéner.

4. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à ce que la décision du 1er avril 2004 soit déclarée illégale.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, d'une part, à la charge de la SCP de notaires Massiani et Roquebert et de M. Maître le versement à la commune d'Ollioules d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, d'autre part, à la charge de Mme F...et de Mmes E...le versement d'une même somme à la commune. Les mêmes dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune le versement des sommes demandées par les requérantes.



D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes de la SCP de notaires Massiani et Roquebert et M. Maître et de Mme F... et Mmes E...sont rejetées.

Article 2 : La SCP de notaires Massiani et Roquebert et M. Maître, d'une part, Mme F...et MmesE..., d'autre part, verseront à la commune d'Ollioules des sommes de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCP de notaires Massiani et Roquebert, à M. A... Maître, à Mme H...F..., à Mme G...E..., à Mme D...E...et à la commune d'Ollioules.
Copie en sera adressée pour information à la société Cap Investissements et à la société Erteco.