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Ariane Web: Conseil d'État 369378, lecture du 11 février 2015, ECLI:FR:Code Inconnu:2015:369378.20150211
Decision n° 369378
Conseil d'État

N° 369378
ECLI:FR:CESSR:2015:369378.20150211
Inédit au recueil Lebon
4ème / 5ème SSR
M. David Moreau, rapporteur
M. Rémi Keller, rapporteur public
SCP BENABENT, JEHANNIN, avocats


Lecture du mercredi 11 février 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi, enregistré le 14 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. A...B..., demeurant ... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 mars 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 décembre 2008 du recteur de l'académie de La Réunion le radiant du corps des professeurs certifiés pour abandon de poste ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel et d'enjoindre au recteur de l'académie de La Réunion de le réintégrer dans le corps des professeurs certifiés avec régularisation rétroactive de sa carrière sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;

Vu l'arrêté du 9 août 2004 portant délégation de pouvoirs du ministre chargé de l'éducation aux recteurs d'académie en matière de gestion des personnels enseignants, d'éducation, d'information et d'orientation de l'enseignement du second degré ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. David Moreau, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bénabent, Jehannin, avocat de M. B...;



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...a été nommé professeur d'éducation physique et sportive dans un collège de l'île de La Réunion en 1997 ; que, pour des raisons de santé, il a cessé d'exercer ces fonctions à compter de la rentrée 1999-2000 ; qu'il a alors été affecté sur des postes d'assistant-documentaliste puis de documentaliste dans différents établissements d'enseignement secondaire de ce département ; que, par un arrêté du 20 août 2007, le recteur d'académie l'a affecté au collège Alsace Corré de Cilaos ; que M. B...n'ayant pas rejoint ce poste, le recteur l'a mis en demeure de le faire, par un courrier du 21 mars 2008, sous peine de radiation des cadres pour abandon de poste ; que, cette mise en demeure n'ayant pas été suivie d'effet, le recteur l'a radié par un arrêté du 15 décembre 2008 ; que par un jugement du 17 novembre 2011, le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ; que M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 mars 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel contre ce jugement ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

2. Considérant qu'aux termes des deuxième et troisième alinéas de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ; que, contrairement à ce que soutient M.B..., la cour ne s'est pas fondée sur des éléments nouveaux qui auraient figuré dans le deuxième mémoire en défense du ministre de l'éducation nationale, enregistré le 31 octobre 2012 ; que, par suite, la circonstance que ce mémoire ne lui a pas été communiqué n'entache pas d'irrégularité la procédure suivie devant la cour ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public " ; que lorsqu'un fonctionnaire refuse de rejoindre son poste ou de reprendre son service sans raison valable en dépit d'une mise en demeure fixant à l'intéressé un délai approprié pour ce faire, il rompt le lien qui l'unit au service et peut dès lors être radié des cadres pour abandon de poste ;

4. Considérant, en premier lieu, que s'il résulte des articles 1 et 2 de l'arrêté du 9 août 2004 portant délégation de pouvoirs du ministre chargé de l'éducation aux recteurs d'académie en matière de gestion des personnels enseignants, d'éducation, d'information et d'orientation de l'enseignement du second degré que les recteurs d'académie n'ont pas reçu délégation de compétence pour prononcer la radiation des cadres pour abandon de poste des enseignants placés en position de détachement, il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...était en détachement à la date de la décision de radiation prononcée à son encontre ; que celui-ci n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la cour aurait commis une erreur de droit en ne relevant pas d'office l'incompétence du recteur de l'académie de La Réunion pour prendre la décision radiant le requérant ;

5. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983 qu'un fonctionnaire ne peut désobéir à un ordre qui lui est donné que si celui-ci est à la fois manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public ; qu'il s'ensuit que, dès lors que la cour a estimé, par un motif qui n'est pas critiqué en cassation, que l'ordre donné à M. B...par la mise en demeure datée du 21 mars 2008 de rejoindre le poste de documentaliste au collège Alsace Corré de Cilaos n'était pas de nature à compromettre gravement un intérêt public, les moyens tirés de ce que l'arrêté d'affectation du 20 août 2007 n'avait pas été régulièrement notifié à l'intéressé, de ce qu'il aurait dû être reclassé et intégré dans le corps des professeurs certifiés en documentation et de ce qu'aucun poste de documentaliste n'était vacant dans ce collège étaient inopérants ; qu'il y a lieu de substituer ce motif, qui n'appelle l'appréciation d'aucune circonstance de fait, à ceux par lesquels l'arrêt attaqué a écarté ces différents moyens ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. B... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. B...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


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