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Ariane Web: Conseil d'État 384190, lecture du 5 juin 2015, ECLI:FR:CECHS:2015:384190.20150605

Décision n° 384190
5 juin 2015
Conseil d'État

N° 384190
ECLI:FR:CESJS:2015:384190.20150605
Inédit au recueil Lebon
1ère SSJS
Mme Florence Marguerite, rapporteur
M. Alexandre Lallet, rapporteur public
SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY ; FOUSSARD, avocats


Lecture du vendredi 5 juin 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...A..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre de recettes émis le 21 août 2012 par le département de Paris pour le recouvrement d'un indu de revenu de solidarité active de 5 942,95 euros pour la période du 1er juin 2009 au 30 juin 2010, de limiter l'indu litigieux à la somme de 3 624,68 euros pour la période du 1er octobre 2009 au 30 juin 2010 et de lui accorder un échéancier de remboursement par mensualités de 152 euros. Par un jugement n° 1218187 du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de recettes du 21 août 2012, déchargé Mme C...du paiement de l'indu pour la période du 1er juin 2009 au 17 septembre 2009 et l'a renvoyée devant le président du conseil de Paris pour la mise en place d'un échéancier de remboursement de sa dette pour la période du 18 septembre 2009 au 30 juin 2010.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 5 septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département de Paris demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 2014 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de MmeC... ;

3°) de mettre à la charge de Mme C...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Florence Marguerite, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Foussard, avocat du département de Paris, et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de Mme C... ;




Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles dispose que : " Toute personne résidant en France de manière stable et effective, dont le foyer dispose de ressources inférieures à un niveau garanti, a droit au revenu de solidarité active dans les conditions définies au présent chapitre (...) ". L'article L. 262-3 du même code précise que l'ensemble des ressources du foyer est pris en compte pour le calcul du revenu de solidarité active, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat. Selon le premier alinéa de l'article R. 262-1 du même code : " Le montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2 applicable à un foyer composé d'une seule personne est majoré de 50 % lorsque le foyer comporte deux personnes. Ce montant est ensuite majoré de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer et à la charge de l'intéressé. Toutefois, lorsque le foyer comporte plus de deux enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à charge, à l'exception du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin de l'intéressé, la majoration à laquelle ouvre droit chacun de ces enfants ou personnes est portée à 40 % à partir de la troisième personne ". L'article R. 262-3 du même code précise enfin que : " Pour le bénéfice du revenu de solidarité active, sont considérés comme à charge : / 1° Les enfants ouvrant droit aux prestations familiales ; / 2° Les autres enfants et personnes de moins de vingt-cinq ans qui sont à la charge effective et permanente du bénéficiaire à condition, lorsqu'ils sont arrivés au foyer après leur dix-septième anniversaire, d'avoir avec le bénéficiaire ou son conjoint, son concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité un lien de parenté jusqu'au quatrième degré inclus (...) ".

2. Il résulte de ces dispositions que, pour le bénéfice du revenu de solidarité active, le foyer s'entend du demandeur, ainsi que, le cas échéant, de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin et des enfants ou personnes de moins de vingt-cinq ans à charge qui remplissent les conditions précisées par l'article R. 262-3 du code de l'action sociale et des familles. Pour l'application de ces dispositions, le concubin est la personne qui mène avec le demandeur une vie de couple stable et continue.

3. Pour juger que Mme A...et M. C...ne formaient pas un foyer, au sens des dispositions de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, durant la période comprise entre le 1er juin et le 17 septembre 2009, le tribunal administratif de Paris s'est fondé, alors que M. C...avait, pour 2008 et 2009, déclaré aux services fiscaux et à son employeur être domicilié ...et à l'étranger pour le compte de son employeur, d'une durée cumulée représentant environ la moitié de la durée de la période considérée. En statuant ainsi, alors que des absences répétées en raison d'obligations professionnelles ne font pas obstacle à l'existence d'une vie de couple stable et continue, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que le département de Paris est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris qu'il attaque. Le moyen d'erreur de droit retenu suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens du pourvoi.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme C... présentées à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C...la somme demandée au même titre par le département de Paris.




D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 2 juillet 2014 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris.
Article 3 : Les conclusions du département de Paris et de Mme C...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au département de Paris et à Mme B...A...épouseC....