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Ariane Web: Conseil d'État 374782, lecture du 18 septembre 2015, ECLI:FR:CECHR:2015:374782.20150918

Décision n° 374782
18 septembre 2015
Conseil d'État

N° 374782
ECLI:FR:CESSR:2015:374782.20150918
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème / 3ème SSR
Mme Esther de Moustier, rapporteur
Mme Nathalie Escaut, rapporteur public
SCP DIDIER, PINET, avocats


Lecture du vendredi 18 septembre 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée Pamier a demandé au tribunal administratif de Montreuil de réduire les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 dans les rôles de la commune du Blanc-Mesnil (93150) à raison de deux immeubles à usage de bureaux. Par un jugement n° 1210428 du 18 novembre 2013, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 janvier et 22 avril 2014 et le 22 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Pamier demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à charge de l'Etat la somme de 3500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;


Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Esther de Moustier, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société Pamier ;



Considérant qu'aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte " ; qu'aux termes de l'article 1495 du même code : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation " ; que l'article 324 A de l'annexe III au même code précise que : " Pour l'application de l'article 1494 du code général des impôts on entend : (...) / 2° Par fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte lorsqu'ils sont situés dans un immeuble collectif ou un ensemble immobilier : / a. Le local normalement destiné à raison de son agencement à être utilisé par un même occupant ; / b. L'établissement industriel dont les éléments concourent à une même exploitation. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les parties d'un ensemble immobilier constituent des " fractions de propriété normalement destinées à une utilisation distincte" au sens de l'article 1494 du code général des impôts lorsqu'elles sont susceptibles de faire l'objet chacune d'une utilisation distincte par un même occupant ; qu'il en va toutefois différemment pour les immeubles de grande hauteur qui, eu égard à leurs spécificités, ne peuvent être évalués que dans leur totalité par comparaison avec d'autres immeubles de grande hauteur ou, à défaut, par voie d'appréciation directe en application du 3° de l'article 1498 du code général des impôts ;

4. Considérant que le tribunal administratif de Montreuil, après avoir relevé sans dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis ni soulever d'office un moyen de fait, que les immeubles " Le Continental " et " Le Bonaparte ", à raison desquels la société Pamier avait été assujettie à des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties dans les rôles de la commune du Blanc-Mesnil, constituaient des ensembles immobiliers dont chaque niveau était divisé en quatre lots de copropriété dont la polyvalence permettait une utilisation distincte ainsi que l'exercice d'activités autonomes les unes par rapport aux autres, n'a pas commis d'erreur de droit en déduisant de ces circonstances que l'administration avait pu procéder à une évaluation distincte par lot de copropriété des surfaces pondérées des immeubles litigieux et, par conséquent, les comparer au local-type retenu sans appliquer d'abattement à la valeur locative unitaire justifié par une différence de superficie ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : (...) / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales (...) " ; qu'aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III à ce code : " La valeur locative cadastrale des biens (...) est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance " ;

6. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les immeubles de la société Pamier sont situés au sein d'un centre d'affaires tandis que le terme de comparaison retenu par l'administration pour évaluer leur valeur locative, s'il n'en est distant que de quelques dizaines de mètres, est implanté dans une zone d'entrepôts ; que, par suite, le tribunal administratif n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en admettant que les immeubles litigieux bénéficiaient d'une situation plus favorable que celle du local-type justifiant que soit appliquée à leur valeur locative une majoration de 10 % ;

7. Considérant, d'autre part, que le tribunal administratif n'a ni insuffisamment motivé son jugement ni dénaturé les pièces du dossier, dont il ne ressortait pas que les fortes dégradations de l'immeuble " Le Bonaparte " aient affecté le gros oeuvre au 1er janvier de chacune des deux années, en estimant que l'état d'entretien de cet immeuble justifiait seulement l'octroi d'un abattement supplémentaire de 20 %, en sus de celui de 20 % déjà accordé par l'administration, portant à 40 % l'abattement au titre de l'état d'entretien ; que la société se bornait devant les juges du fond à demander le bénéfice d'un abattement supérieur et n'a pas soulevé le moyen tiré de ce que l'immeuble devait être exonéré de taxe foncière sur les propriétés bâties ; que ce moyen nouveau en cassation et qui n'est pas d'ordre public est sans incidence sur le jugement attaqué ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Pamier n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Pamier est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Pamier et au ministre des finances et des comptes publics.


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