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Ariane Web: Conseil d'État 376593, lecture du 30 septembre 2015, ECLI:FR:CECHS:2015:376593.20150930

Décision n° 376593
30 septembre 2015
Conseil d'État

N° 376593
ECLI:FR:CESJS:2015:376593.20150930
Inédit au recueil Lebon
5ème SSJS
M. Charles Touboul, rapporteur
M. Nicolas Polge, rapporteur public
LE PRADO ; SCP FOUSSARD, FROGER, avocats


Lecture du mercredi 30 septembre 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Le syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran, M. et Mme B..., ainsi que M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner la Ville de Paris à leur verser respectivement les sommes de 5 029,50 euros, 120 494,99 euros et 29 940,35 euros, assorties des intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête, en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait des travaux de réfection du centre sportif Valeyre et de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-l du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1121991/3-2 du 13 février 2013, le tribunal administratif a condamné la Ville de Paris à verser la somme de 1 266 euros aux épouxA..., la somme de 18 620, 75 euros aux époux B...et la somme de 1 582,50 euros au syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran.

Par un arrêt n° 13PA01416 du 23 janvier 2014, la cour administrative d'appel de Paris a, à la demande du syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran, de M. et Mme B... et de M. et Mme A..., porté à 2 682,50 euros TTC la somme que la Ville de Paris est condamnée à verser au syndicat des copropriétaires du 4, rue Mayran et rejeté le surplus de leurs conclusions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 20 juin 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran, M. et Mme B..., M. et Mme A..., demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la Ville de Paris la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles Touboul, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat du syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran, de M. et Mme B...et de M. et Mme A... et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la Ville de Paris ;



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'immeuble situé 4 rue Mayran, dans le 9ème arrondissement de Paris, a subi des infiltrations d'eau provenant du centre sportif Valeyre, mitoyen, relevant de la Ville de Paris ; que le syndicat des copropriétaires de cet immeuble ainsi que les époux B...etA..., copropriétaires, ont saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'indemnisation de leur préjudice ; que, par un jugement en date du 13 février 2013 du tribunal administratif, la Ville de Paris a été reconnue responsable à l'égard des requérants pour les dommages aux parties communes et condamnée à verser 1 266 euros aux épouxA..., 18 620, 75 euros aux époux B...et 1 582,50 euros au syndicat des copropriétaires ; que les requérants se pourvoient en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a rejeté certaines de leurs conclusions ;

En ce qui concerne le préjudice matériel des épouxA... :

2. Considérant que pour rejeter les conclusions tendant à l'indemnisation des époux A...de la totalité des travaux faisant l'objet de la facture du 7 avril 2008 d'un montant de 9 070,00 euros HT, la cour, qui n'a retenu que la somme de 1 200 euros HT, a estimé qu'aucun élément du dossier ne permet d'apprécier l'importance des dégradations résultant des infiltrations d'eau causées par le centre sportif dès lors que ces travaux avaient été exécutés avant la première réunion d'expertise ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier qui lui était soumis que les requérants avaient joint un constat d'huissier en date du 8 septembre 2006, antérieur à la réalisation des travaux, qui décrivait, photographies à l'appui, l'état de plusieurs pièces de l'appartement et faisait, en particulier, état de nombreuses traces d'humidité sur les murs et plafonds de trois de ces pièces ; que, dans ces conditions, la cour a dénaturé les pièces du dossier en rejetant pour ce motif la demande d'indemnisation dont elle était saisie ; que l'arrêt doit être annulé dans cette mesure ;

En ce qui concerne le préjudice matériel du syndicat des copropriétaires ;

3. Considérant que la cour a rejeté, dans le dispositif de son arrêt, les conclusions du syndicat des copropriétaires de l'immeuble tendant à l'indemnisation des honoraires de maîtrise d'oeuvre d'un montant de 2 392 euros TTC pour la reprise des appartements sans motiver le rejet de ces conclusions alors que les pièces du dossier qui lui était soumis ne font pas apparaître que ces honoraires se rapporteraient aux seules fissures dans la cage d'escalier dont la cour a jugé qu'elles étaient sans lien avec les infiltrations d'eau ; que l'arrêt doit être annulé dans cette mesure ;

En ce qui concerne le préjudice de jouissance des épouxB... :

4. Considérant que, pour rejeter la demande d'indemnisation du préjudice de jouissance des épouxB..., la cour s'est appropriée les motifs par lesquels le tribunal avait rejeté ces conclusions, tirés de ce qu'il ne résulte pas de l'instruction que les requérants auraient vainement proposé leur logement à la location ou à la vente ni qu'eux-mêmes ou leurs enfants auraient effectivement occupé cet appartement ; que, toutefois, il ressort du rapport de l'expert qui figurait dans les pièces du dossier soumis à la cour que l'augmentation de l'humidité dans le mur de soutènement rendait totalement inhabitable le logement du rez-de-chaussée appartenant aux épouxB... ; que, par suite, en rejetant ces conclusions par adoption des motifs retenus par le tribunal, la cour a dénaturé les pièces du dossier ; que son arrêt doit, en conséquence, être également annulé dans cette mesure ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de M. et Mme A...relatives à leur préjudice matériel dans la limite de 7 870 euros HT, les conclusions du syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran relatives à des honoraires de maîtrise d'oeuvre dans la limite de 2 392 euros TTC et celles de M. et Mme B...relatives à leur préjudice de jouissance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Ville de Paris le versement aux requérants de la somme globale de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge des requérants qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la Ville de Paris demande sur leur fondement ;



D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 de l'arrêt n°13PA01416 du 23 janvier 2014 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran en ce qui concerne l'indemnisation des honoraires de maîtrise d'oeuvre, celles des époux A...en ce qui concerne le surplus du préjudice matériel et celles des époux B...en ce qui concerne leur préjudice de jouissance.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : La Ville de Paris versera une somme globale de 3 000 euros au syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran, à M. et MmeA..., et à M. et Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la Ville de Paris au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au syndicat des copropriétaires du 4 rue Mayran, à M. et MmeA..., à M. et Mme B...et à la Ville de Paris.