Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 372067, lecture du 23 novembre 2015, ECLI:FR:CECHR:2015:372067.20151123

Décision n° 372067
23 novembre 2015
Conseil d'État

N° 372067
ECLI:FR:CESSR:2015:372067.20151123
Inédit au recueil Lebon
9ème / 10ème SSR
M. Julien Anfruns, rapporteur
M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public
SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR, avocats


Lecture du lundi 23 novembre 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La SA Finvestcorp a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2004. Par un jugement n° 0803566 du 6 décembre 2011, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12BX00288 du 11 juillet 2013, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par la SA Finvestcorp contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 septembre 2013, 11 décembre 2013 et 24 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la SA Finvestcorp demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Anfruns, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de la SA Finvestcorp ;


1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir acquis un ensemble d'immeubles au centre de Bordeaux et avoir commencé leur restructuration afin d'édifier le futur Grand Hôtel de Bordeaux, la SNC Paris Le Havre, dont le capital social est intégralement détenu par la SA Finvestcorp, s'est trouvée confrontée à des difficultés de trésorerie qu'elle a souhaité résoudre en procédant à une opération de cession-bail consistant en la vente du bâtiment en l'état futur d'achèvement à un organisme de crédit-bail qui se serait engagé à le lui donner à bail et à lui consentir une option d'achat ; qu'au vu des propositions de prix d'achat qui lui étaient faites, la SNC Paris Le Havre a constitué une provision pour perte d'un montant de 12 millions d'euros au titre de l'exercice clos en 2004, dont l'administration fiscale a, à la suite d'une vérification de comptabilité, remis en cause la déductibilité ; que par un jugement du 6 décembre 2011, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de la SA Finvestcorp tendant à la décharge des impositions et pénalités correspondantes ; que par un arrêt du 11 juillet 2013, contre lequel la SA Finvestcorp se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête d'appel contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment :/ (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que les événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice... " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice, qu'elles se rattachent par un lien direct aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ; qu'en outre, les provisions pour perte ne peuvent être déduites que si la perspective de la perte se trouve établie par la comparaison, pour une opération ou un ensemble d'opérations suffisamment homogènes, entre les coûts à supporter et les recettes escomptées ;

3. Considérant qu'après avoir relevé que la lettre du 14 décembre 2004 de la société Fortis ne faisait état que d'une proposition de rachat de l'immeuble par syndication de plusieurs établissements bancaires, la cour a jugé que cette lettre ne saurait, en l'absence de toute preuve d'accord de la société requérante sur cette proposition, être regardée comme constitutive d'une obligation de cette dernière ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 qu'en en déduisant que la provision en litige n'était pas déductible du résultat imposable de la SNC Paris Le Havre, la cour, qui n'a omis de répondre à aucun moyen opérant de cette société, n'a pas commis d'erreur de droit et n'a pas donné aux faits qu'elle a énoncés une qualification juridique erronée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA Finvestcorp n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux qu'elle attaque ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;


D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la SA Finvestcorp est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SA Finvestcorp et au ministre des finances et des comptes publics.