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Ariane Web: Conseil d'État 395143, lecture du 15 février 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:395143.20160215

Décision n° 395143
15 février 2016
Conseil d'État

N° 395143
ECLI:FR:CESSR:2016:395143.20160215
Inédit au recueil Lebon
3ème - 8ème SSR
M. Romain Victor, rapporteur
Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public
SCP VINCENT, OHL, avocats


Lecture du lundi 15 février 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La communauté de communes du Val-de-Drôme, à l'appui de sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 28 mai 2014 par lequel le préfet de la Drôme a fixé les conditions patrimoniales et financières du retrait des communes de Bézaudun-sur-Bine, Bourdeaux, Bouvières, Crupies, des Tonils et Truinas, a produit un mémoire, enregistré le 25 septembre 2015 au greffe du tribunal administratif de Grenoble, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 14043373 du 8 décembre 2015, enregistrée le 9 décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Grenoble, avant qu'il soit statué sur la demande de la communauté de communes du Val-de-Drôme, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du 2° de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Romain Victor, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Bézaudun-sur-Bine, de la commune de Bourdeaux, de la commune de Bouvières, de la commune de Crupies, de la commune des Tonils et de la commune de Truinas ;


1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales : " En cas de retrait de la compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale : / 1° Les biens meubles et immeubles mis à la disposition de l'établissement bénéficiaire du transfert de compétences sont restitués aux communes antérieurement compétentes et réintégrés dans leur patrimoine pour leur valeur nette comptable, avec les adjonctions effectuées sur ces biens liquidées sur les mêmes bases. Le solde de l'encours de la dette transférée afférente à ces biens est également restitué à la commune propriétaire ; /2° Les biens meubles et immeubles acquis ou réalisés postérieurement au transfert de compétences sont répartis entre les communes qui reprennent la compétence ou entre la commune qui se retire de l'établissement public de coopération intercommunale et l'établissement ou, dans le cas particulier d'un syndicat dont les statuts le permettent, entre la commune qui reprend la compétence et le syndicat de communes. Il en va de même pour le produit de la réalisation de tels biens, intervenant à cette occasion. Le solde de l'encours de la dette contractée postérieurement au transfert de compétences est réparti dans les mêmes conditions entre les communes qui reprennent la compétence ou entre la commune qui se retire et l'établissement public de coopération intercommunale ou, le cas échéant, entre la commune et le syndicat de communes. A défaut d'accord entre l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale et les conseils municipaux des communes concernés, cette répartition est fixée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés. Cet arrêté est pris dans un délai de six mois suivant la saisine du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou de l'une des communes concernées. / Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur échéance, sauf accord contraire des parties. La substitution de personne morale aux contrats conclus par les établissements publics de coopération intercommunale n'entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant. L'établissement public de coopération intercommunale qui restitue la compétence informe les cocontractants de cette substitution " ; que la communauté de communes du Val-de-Drôme soutient que les dispositions du 2° de cet article méconnaissent les principes d'égalité devant les charges publiques, de libre administration et d'autonomie financière des collectivités territoriales, ainsi que le principe en vertu duquel le législateur a l'obligation d'exercer pleinement les compétences qu'il tient de l'article 34 de la Constitution ;

3. Considérant que, par les dispositions du 2° de l'article L. 5211-25-1 du code général des collectivités territoriales, le législateur a défini les modalités de répartition entre les personnes publiques concernées, en cas de retrait d'une compétence transférée par une commune à un établissement public de coopération intercommunale, des biens acquis ou réalisés par cet établissement postérieurement au transfert, ainsi que de l'encours de la dette contractée postérieurement à ce transfert, en prévoyant qu'à défaut d'accord entre l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale et le conseil municipal de la commune concernés, cette répartition est arrêtée par le représentant de l'Etat dans le département ; que, pour la mise en oeuvre d'une telle répartition, il appartient au représentant de l'Etat de veiller, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, à garantir un partage équilibré de l'ensemble des éléments d'actif et de passif nés postérieurement au transfert de compétences et antérieurement au retrait de la commune du périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale, en tenant notamment compte, le cas échéant, d'une partie des charges fixes liées à la réalisation d'un équipement financé par cet établissement ; que, dans ces conditions, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;



D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la communauté de communes du Val-de-Drôme.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la communauté de communes du Val-de-Drôme, au Premier ministre et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au tribunal administratif de Grenoble.