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Ariane Web: Conseil d'État 393590, lecture du 11 juillet 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:393590.20160711

Décision n° 393590
11 juillet 2016
Conseil d'État

N° 393590
ECLI:FR:CECHR:2016:393590.20160711
Inédit au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
Mme Sophie-Caroline de Margerie, rapporteur
M. Xavier Domino, rapporteur public
SCP LYON-CAEN, THIRIEZ, avocats


Lecture du lundi 11 juillet 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 septembre 2015 et 23 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté du 10 octobre 1957 relatif au survol des agglomérations et des rassemblements de personnes ou d'animaux ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'abroger cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 150 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le règlement n° 549/2004 du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2004 ;
- le règlement d'exécution (UE) n° 923/2012 de la Commission du 26 septembre 2012 ;
- le code des transports ;
- l'arrêté du 11 décembre 2014 relatif à la mise en oeuvre du règlement d'exécution (UE) n° 923/2012 ;
- le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ;




1. Considérant que l'article 1er de l'arrêté du 10 octobre 1957 relatif au survol des agglomérations et des rassemblements de personnes ou d'animaux, que M. B...a demandé au ministre de l'intérieur d'abroger dispose que : " sauf pour les besoins du décollage ou de l'atterrissage... les aéronefs motopropulsés... doivent se maintenir à une hauteur minima du sol définie comme suit : (...) D. Pour le survol de toute ville (Paris excepté) dont la largeur moyenne est supérieure à 3 600 mètres... : 1 500 mètres pour les aéronefs motopropulsés (...) " ;

2. Considérant que le règlement d'exécution (UE) n° 923/2012 de la Commission du 26 septembre 2012 établissant les règles de l'air communes et des dispositions opérationnelles relatives aux services et procédures de navigation aérienne comporte en son annexe intitulée Règles de l'air, d'une part, un point intitulé SERA. 3105 Hauteurs minimales, qui dispose que " Sauf pour les besoins du décollage ou de l'atterrissage (...), les aéronefs ne volent pas au-dessus des zones à forte densité, des villes ou autres agglomérations (...), à moins qu'ils ne restent à une hauteur suffisante pour leur permettre, en cas d'urgence, d'atterrir sans mettre indûment en danger les personnes ou les biens à la surface. Les hauteurs minimales qui s'appliquent aux vols VFR sont spécifiées à la règle SERA. 5005, point f) (...) ", d'autre part, un point intitulé SERA. 5005 Règles de vol à vue, qui dispose que : " (...) f) Sauf pour les besoins du décollage ou de l'atterrissage (...), aucun vol VFR n'est effectué : / 1) au-dessus des zones à forte densité, des villes ou autres agglomérations (...) à moins de 300 m (1000 ft) au-dessus de l'obstacle le plus élevé situé dans un rayon de 600 m autour de l'aéronef (...) " ; que son article 8 prévoit que les Etats membres qui, avant l'entrée en vigueur du règlement, avaient adopté des dispositions supplémentaires devaient veiller à ce que ces dispositions soient conformes au règlement et devaient les publier ; que cette publication a été effectuée par l'arrêté du 11 décembre 2014 relatif à la mise en oeuvre de ce règlement, qui prévoit au point FRA. 5005 f) 1) de son annexe 1 que s'appliquent les hauteurs minimales de survol des agglomérations définies dans l'arrêté du 10 octobre 1957 ;

3. Considérant, en premier lieu, que, comme l'a au demeurant relevé le comité du ciel unique créé par le règlement n° 549/2004 du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2004 fixant le cadre pour la réalisation du ciel unique européen, les dispositions du règlement d'exécution de la Commission du 26 septembre 2012 qui fixent une hauteur minimale qui s'applique au survol des agglomérations par les vols à vue, dit vols VFR, ne font pas obstacle à ce que les Etats membres puissent fixer des hauteurs plus élevées pour le survol de certaines agglomérations ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait contraire aux dispositions du règlement du 26 septembre 2012 doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la hauteur minimale de survol de 1 500 mètres, qui a été déterminée dans un but d'intérêt général de protection des usagers et des populations survolées, ne porte pas une atteinte excessive à la liberté de circulation dans l'espace aérien ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'article L. 6211-1 du code des transports, qui prévoit que " Tout aéronef peut circuler librement au-dessus du territoire français (...) " ne prive pas les autorités compétentes du pouvoir de réglementer la circulation aérienne ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé, en tout état de cause, à soutenir que l'arrêté litigieux ne pourrait légalement se fonder sur l'article R. 131-1 du code de l'aviation civile qui prévoit que le survol d'une agglomération par un aéronef ne peut se faire qu'à une altitude rendant l'atterrissage toujours possible ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête, M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet, née du silence gardé sur sa demande d'abrogation de l'arrêté du 10 octobre 1957 ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat ;


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.