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Ariane Web: Conseil d'État 394080, lecture du 19 juillet 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:394080.20160719

Décision n° 394080
19 juillet 2016
Conseil d'État

N° 394080
ECLI:FR:CECHR:2016:394080.20160719
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
Mme Emmanuelle Petitdemange, rapporteur
M. Benoît Bohnert, rapporteur public
SCP GATINEAU, FATTACCINI, avocats


Lecture du mardi 19 juillet 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 15 octobre 2015, 21 janvier 2016 et 14 mars 2016, la SAS Arcos Dorados Martinique demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-1077 du 26 août 2015 pris pour l'application de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-762 du 29 juin 2015 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 ;
- la loi n° 2015-762 du 29 juin 2015 ;
- le décret n° 2015-1077 du 26 août 2015 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emmanuelle Petitdemange, auditeur,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la société Arcos Dorados Martinique ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer dans sa rédaction issue de la loi du 29 juin 2015: " I.-En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion, sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer : 1° Les importations de biens ; 2° Les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par les personnes qui les ont produits (...). " ; qu'aux termes de l'article 2 de cette même loi dans sa rédaction issue de la même loi: " Sont assujetties à l'octroi de mer les personnes qui exercent de manière indépendante, à titre exclusif ou non exclusif, une activité de production dans une collectivité mentionnée à l'article 1er, lorsque, au titre de l'année civile précédente, leur chiffre d'affaires afférent à cette activité a atteint ou dépassé 300 000 euros, quels que soient leur statut juridique et leur situation au regard des autres impôts. / Sont considérées comme des activités de production les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives (...) " ;

2. Considérant que les conclusions de la société doivent être regardées comme tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des dispositions du III de l'article 2 du décret du 26 août 2015 pris pour l'application de la loi du 2 juillet 2004 aux termes desquelles : " III. - Au sens de l'article 2 de la loi du 2 juillet 2004 susvisée, constitue une transformation toute modification de l'état d'un bien, qu'il y ait ou non un changement de position tarifaire, à l'exception des opérations de conditionnement ou de manutention " ;

3. Considérant; qu'il ressort des travaux parlementaires de la loi du 2 juillet 2004 que le législateur, qui a exclu du champ d'application de la loi les prestations de services, a entendu limiter la notion de production mentionnée à l'article 2 à la production, la transformation et la rénovation de biens, à l'exclusion des manipulations qui peuvent être opérées sur un produit ; qu'il en résulte que seules relèvent des opérations de transformation au sens de cet article les opérations modifiant la nature même du produit et non celles impliquant des ajustements mineurs de son état ne concourant pas à l'élaboration d'un produit nouveau ; que, par suite, en disposant que constitue une transformation toute modification de l'état d'un bien, le III de l'article 2 du décret attaqué doit être regardé comme ajoutant à la loi ; qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la société est fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation du décret attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Arcos Dorados Martinique au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le paragraphe III de l'article 2 du décret n° 2015-1077 du 26 août 2015 est annulé.
Article 2 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à la société Arcos Dorados Martinique au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SAS Arcos Dorados Martinique, au ministre des finances et des comptes publics et à la ministre des outre-mer
Copie sera adressée au Premier ministre.


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