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Ariane Web: Conseil d'État 396011, lecture du 7 septembre 2016, ECLI:FR:CECHS:2016:396011.20160907

Décision n° 396011
7 septembre 2016
Conseil d'État

N° 396011
ECLI:FR:CECHS:2016:396011.20160907
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre
M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur
Mme Maud Vialettes, rapporteur public
HAAS ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON, avocats


Lecture du mercredi 7 septembre 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. B... A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du 1er octobre 2015 par laquelle la direction de La Poste a rejeté sa demande de prolongation d'activité. Par une ordonnance n° 1500800 du 25 novembre 2015, le juge des référés a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 et 26 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande et d'enjoindre à La Poste de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Caston, avocat de M. A...et à Me Haas, avocat de La Poste ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A..., agent public de La Poste atteint par la limite d'âge, a demandé à son employeur son maintien en activité sur le fondement des dispositions de la loi du 19 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté ; que La Poste a rejeté cette demande par une première décision du 18 mai 2015 et, a par une décision du 26 juin 2015, mis à la retraite M. A... à compter du 31 juillet 2015 ; qu'après que le juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre a, par une ordonnance du 16 septembre 2015, ordonné la suspension de ces décisions et ordonné à La Poste de réexaminer la situation de M. A..., La Poste a, par une décision du 1er octobre 2015, de nouveau rejeté la demande de prolongation d'activité ; que, par une ordonnance du 25 novembre 2015 contre laquelle M. A... se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de cette décision ;

3. Considérant que la première phrase du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 19 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté dispose : " Les limites d'âge seront également reculées d'une année pour tout fonctionnaire et employé civil qui, au moment où il atteignait sa cinquantième année, était parent d'au moins trois enfants vivants, à la condition qu'il soit en état de continuer à exercer son emploi " ;

4. Considérant que, pour juger que le moyen de M.A..., tiré de ce qu'il remplissait les conditions posées par les dispositions citées ci-dessus, n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, le juge des référés s'est fondé sur ce que l'intéressé était en congé de maladie à la date à laquelle il a atteint la limite d'âge ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si M. A...était, malgré cet arrêt de maladie, apte à continuer d'exercer son emploi, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A..., agent titulaire de La Poste était, à la date à laquelle il a atteint la limite d'âge, affecté à un emploi de facteur ; qu'il résulte également de l'instruction qu'il n'était à cette date, au vu de deux avis successifs du médecin du travail, plus en mesure d'effectuer des activités de distribution ; que, par suite, le moyen tiré de ce que M. A... était apte à continuer à exercer son emploi au sens des dispositions du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 18 août 1936 citée ci-dessus n'est pas propre à créer un doute sérieux quand à la légalité de la décision du 1er octobre 2015 ;

7. Considérant que n'est pas davantage de nature à faire naître un tel doute la circonstance que, par un motif erroné mais surabondant, cette même décision a précisé que La Poste n'était pas en mesure de proposer un poste de reclassement compatible avec l'inaptitude de M. A... ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, l'une des conditions prévues par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'étant pas remplie, la demande de M. A... tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 1er octobre 2015 ne peut qu'être rejetée ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de La Poste qui n'est pas la partie perdante dans la présence instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que La Poste demande au titre de ces mêmes dispositions ;



D E C I D E
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Basse Terre du 25 novembre 2015 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées tant par M. A... que par La Poste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à La Poste.