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Ariane Web: Conseil d'État 391710, lecture du 3 octobre 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:391710.20161003

Décision n° 391710
3 octobre 2016
Conseil d'État

N° 391710
ECLI:FR:CECHR:2016:391710.20161003
Mentionné aux tables du recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Tristan Aureau, rapporteur
M. Xavier Domino, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats


Lecture du lundi 3 octobre 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 375124 du 27 février 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, sur pourvoi de la garde des sceaux, ministre de la justice, annulé l'arrêt n° 12PA05019 du 19 décembre 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement n° 1111616 du 19 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir les décisions du 20 décembre 2010 rejetant les demandes de changement de nom des consortsA....

Par un arrêt n° 15PA01093 du 26 mai 2015, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la garde des sceaux, ministre de la justice, contre le jugement du tribunal administratif du 19 octobre 2012.

Par un pourvoi, enregistré le 13 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la garde des sceaux, ministre de la justice, demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.


Vu les autres pièces du dossier :

Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Tristan Aureau, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat des consorts A...;




1. Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. / La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré (...) " ; que le relèvement d'un nom afin d'éviter son extinction ne saurait s'appliquer à un nom d'usage mais suppose qu'il soit établi que le nom en cause a été légalement porté par un ascendant de celui qui demande à changer de nom ou par un collatéral jusqu'au quatrième degré ;

2. Considérant que, pour juger que le garde des sceaux, ministre de la justice ne pouvait légalement refuser la demande de relèvement du nom " de D...de B..." présentée par les consortsA..., la cour administrative d'appel de Paris s'est fondée sur la possession d'état de ce patronyme par leur bisaïeule ; qu'en se fondant sur cette possession d'état, alors qu'en absence d'action de l'ascendant, celui-ci ne peut en tout état de cause être regardé comme ayant légalement porté un tel nom, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que le garde des sceaux, ministre de la justice est ainsi fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

3. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire " ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond ;

4. Considérant que la seule circonstance que la bisaïeule ainsi que d'autres membres de la famille aient accolé le nom " de B..." au nom " de D..." ne suffit pas à établir que ce nom ait été porté légalement ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur cette circonstance pour annuler les décisions du 20 décembre 2010 par lesquelles le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de proposer au Premier ministre l'ajout du nom " de D...de B..." au patronyme des consorts A...;

5. Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les consorts A...devant le tribunal administratif de Paris et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des décisions du garde des sceaux, ministre de la justice en date du 20 décembre 2010 mentionnées ci-dessus ;

6. Considérant que l'analyse, qui indiquait, en marge de l'acte de naissance de la bisaïeule et de la trisaïeule dont se prévalaient les requérants, le nom " de D...E...B...", n'est destinée qu'à faciliter le travail de recherche et d'analyse de l'officier de l'état civil en cas de délivrance de copies ou d'extraits d'un acte de l'état civil et n'a pas la force probante qui s'attache aux énonciations contenues dans l'acte ; que les requérants ne sauraient donc utilement se fonder sur une telle mention pour établir que le nom " de D...E...B..." aurait été légalement porté par leur aïeule alors qu'il ressort de ces pièces qu'elle portait le nom
" de D..." ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé les décisions attaquées ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;


D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 26 mai 2015 et le jugement du tribunal administratif de Paris du 19 octobre 2012 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par les consorts A...devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par les consorts A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, et à M. C... A..., premier défendeur dénommé. Les autres défendeurs seront informés de la présente décision par la SCP Foussard-Froger, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.



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