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Ariane Web: Conseil d'État 397026, lecture du 13 décembre 2016, ECLI:FR:CECHR:2016:397026.20161213

Décision n° 397026
13 décembre 2016
Conseil d'État

N° 397026
ECLI:FR:CECHR:2016:397026.20161213
Inédit au recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
M. Pierre Lombard, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public
SCP DELAPORTE, BRIARD, avocats


Lecture du mardi 13 décembre 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire, et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 15 février, 17 et 18 mai, 14 juin et 25 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune d'Ablon-sur-Seine, la commune d'Athis-Mons, la commune de l'Haÿ-les-Roses, la commune de Juvisy-sur-Orge, la commune de Paray-Vieille-Poste, la commune de Rungis, la commune de Savigny-sur-Orge, la commune de Thiais, la commune de Villejuif, la commune de Villeneuve-le-Roi et la commune de Viry-Châtillon demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-1665 du 11 décembre 2015 relatif à la métropole du Grand Paris et fixant le périmètre de l'établissement public territorial dont le siège est à Vitry-sur-Seine ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ;
- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Lombard, auditeur,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, avocat de la commune d'Ablon-sur-Seine, de la commune d'Athis-Mons, de la commune de L'Haÿ-les-Roses, de la commune de Juvisy-sur-Orge, de la commune de Paray-Vieille-Poste, de la commune de Rungis, de la commune de Vigny-sur-Orge, de la commune de Thiais, de la commune de Villejuif, de la commune Villeneuve-le-Roy et de la commune de Viry-Chatillon ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 30 novembre 2016, présentée par la commune d'Ablon-sur-Seine et autres.



Considérant ce qui suit :

1. Par un décret n° 2015-1665 du 11 décembre 2015, le Premier ministre a fixé le périmètre de l'établissement public territorial dont le siège est à Vitry-sur-Seine (EPT T12). La commune d'Ablon-sur-Seine et autres demandent l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret.

2. Aux termes de l'article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales : " I.- Il est créé au 1er janvier 2016 un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à statut particulier dénommé la métropole du Grand Paris (...) ". Aux termes de l'article L. 5219-8 du même code : " Dans le périmètre de la métropole du Grand Paris, sont créés, au 1er janvier 2016, des établissements publics de coopération intercommunale dénommés "établissements publics territoriaux". (...) D'un seul tenant et sans enclave, d'au moins 300 000 habitants, ces établissements regroupent l'ensemble des communes membres de la métropole du Grand Paris, à l'exception de la commune de Paris. Les communes appartenant à un même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à la date de promulgation de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République ne peuvent appartenir à des établissements publics territoriaux distincts. / (...) Le périmètre et le siège de l'établissement public territorial sont fixés par décret en Conseil d'Etat, après consultation, par le représentant de l'Etat dans la région d'Ile-de-France, des conseils municipaux des communes concernées, qui disposent d'un délai d'un mois pour rendre leur avis. La définition de ces périmètres peut prendre en compte les territoires de projet constitués en vue de l'élaboration de contrats de développement territorial prévus à l'article 21 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris ".

Sur la régularité de la procédure de consultation :

3. Les collectivités territoriales dont une disposition législative ou réglementaire prévoit la consultation, avant l'intervention d'une décision, doivent être mises à même d'exprimer leur avis sur l'ensemble des questions soulevées par cette décision. Par suite, dans le cas où, après avoir recueilli leur avis, l'autorité compétente pour prendre cette décision envisage d'apporter à son projet des modifications soulevant des questions nouvelles, elle doit les consulter à nouveau. En l'espèce, les dispositions de l'article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales, citées au point 2, imposaient de consulter préalablement les communes intéressées sur la définition du périmètre et du siège de l'établissement public territorial T12 et, le cas échéant, de procéder à une nouvelle consultation pour autant qu'une modification, envisagée en cours de procédure, ait été susceptible d'affecter l'équilibre général du futur établissement public territorial, en soulevant ainsi une question nouvelle.

4. La commune d'Ablon-sur-Seine et autres relèvent que le projet relatif à l'établissement public territorial T12 sur lequel elles ont été consultées faisait apparaître un périmètre comprenant 22 communes, alors que le décret attaqué a finalement retenu un périmètre incluant 2 communes supplémentaires, Valenton et Villeneuve-Saint-Georges. Les communes requérantes font valoir qu'elles n'ont pas été mises à même de faire connaître leur avis sur l'élargissement du périmètre de l'établissement public territorial T12 à ces communes de Valenton et de Villeneuve-Saint-Georges. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'établissement public territorial constitué par l'effet du décret attaqué a une population d'environ 677 000 habitants, au sein de laquelle les communes de Valenton et de Villeneuve-Saint-Georges ne comptent respectivement que pour 12 000 et 32 000 habitants. Ainsi et dans les circonstances de l'espèce, l'élargissement du périmètre de l'établissement public territorial T12 à ces deux communes doit être regardé, par sa portée, non comme ayant soulevé une question nouvelle de nature à imposer que toutes les communes initialement consultées le soient à nouveau, mais comme un simple ajustement du périmètre de cet établissement public territorial dont l'équilibre général ne s'est pas trouvé affecté. Dès lors, le Premier ministre a pu décider d'inclure au sein de l'établissement public territorial T12 les communes de Valenton et de Villeneuve-Saint-Georges sans méconnaître l'obligation de consultation préalable qui lui incombait en vertu des dispositions précitées de l'article L. 5219-2 du code général des collectivités territoriales. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de consultation doit être écarté.

Sur les autres moyens de la requête :

5. La commune d'Ablon-sur-Seine et autres soutiennent que le décret attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, au motif que l'établissement public territorial qu'il institue retient un périmètre de dimension excessive et dépourvu de toute cohérence territoriale, et que ce périmètre regroupe deux ensembles de communes ne partageant pas une même conception de leur développement. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'EPT 12, qui a légalement été constitué selon les conditions fixées à l'article L. 5219-8 du code général des collectivités territoriales, n'est pas dépourvu de cohérence territoriale ni ne s'inscrit dans un périmètre de dimension excessive. Au demeurant il ressort également des pièces du dossier que l'établissement public territorial T12 a conduit au regroupement de trois communautés d'agglomération dont aucune n'atteignait le seuil de population requis pour constituer, à elle seule, un établissement public territorial. Il suit de là que l'erreur manifeste d'appréciation alléguée n'est pas établie.

6. Enfin, il n'est pas établi que le décret attaqué, qui répond notamment au souhait de rattachement des communes de Valenton et de Villeneuve-Saint-Georges, partagé par 9 des 22 communes initialement consultées sur le projet, de périmètre, soit entaché d'un détournement de pouvoir.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Ablon-sur-Seine et autres ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret attaqué. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la commune d'Ablon-sur-Seine et autres soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la commune d'Ablon-sur-Seine et autres est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune d'Ablon-sur-Seine, à la commune d'Athis-Mons, à la commune de l'Haÿ-les-Roses, à la commune de Juvisy-sur-Orge, à la commune de Paray-Vieille-Poste, à la commune de Rungis, à la commune de Savigny-sur-Orge, à la commune de Thiais, à la commune de Villejuif, à la commune de Villeneuve-le-Roi, à la commune de Viry-Châtillon, au ministre de l'intérieur et au Premier ministre.
Copie sera adressée au ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales


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