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Ariane Web: Conseil d'État 387674, lecture du 6 janvier 2017, ECLI:FR:CECHS:2017:387674.20170106

Décision n° 387674
6 janvier 2017
Conseil d'État

N° 387674
ECLI:FR:CECHS:2017:387674.20170106
Inédit au recueil Lebon
10ème chambre
M. Laurent Domingo, rapporteur
M. Benoît Bohnert, rapporteur public
SCP SPINOSI, SUREAU, avocats


Lecture du vendredi 6 janvier 2017
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière (SCI) Sebimo a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 à raison d'un local dont elle est propriétaire dans la commune de Villeurbanne (Rhône). Par un jugement n°s 1102376, 1201365, 1208380 du 25 novembre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes et a condamné la société Sebimo au paiement d'une amende de 1 000 euros sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 février, 4 mai 2015 et 12 décembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Sebimo demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la SCI Sebimo ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces des dossiers soumis au juge du fond que la société Sebimo a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2010 à 2012 à raison d'un immeuble dont elle est propriétaire à Villeurbanne (Rhône). Elle se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 novembre 2014 qui a rejeté ses demandes tendant à la réduction de ces impositions et l'a condamnée au paiement d'une amende de 1 000 euros pour recours abusif.

Sur le bien-fondé du jugement en ce qui concerne la taxe foncière sur les propriétés bâties :

2. Le tribunal administratif n'a pas dénaturé les pièces des dossiers qui lui étaient soumis en relevant que, dans la déclaration n° 6659 relative à un bien à usage professionnel ou un bien divers déposée le 11 septembre 1998, la société avait indiqué que son local était un entrepôt clos et couvert servant de lieu de dépôt et qu'il avait été donné en location à une entreprise ayant pour activité le commerce de gros en textile et en en déduisant qu'il s'agissait d'un local commercial, alors que la société ne faisait état d'aucune précision sur les installations techniques, matériels et outillages qui auraient pu donner un caractère industriel au local et s'était bornée à mentionner ses tentatives pour le relouer comme local industriel. Il n'a pas commis d'erreur de droit en ne recherchant pas, compte tenu des éléments qui lui étaient soumis, si le local avait en réalité un caractère industriel.

3. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, la valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : " 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ".

4. Il résulte de ces dispositions que lorsque l'administration procède à une évaluation par comparaison, il appartient au contribuable, s'il s'y croit fondé, de contester devant le juge de l'impôt la pertinence du local-type retenu pour le calcul de la valeur locative puis de lui soumettre des propositions alternatives permettant d'évaluer la valeur locative de son local par référence à d'autres locaux-types.

5. D'une part, la société Sebimo n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif aurait dû répondre à sa critique du local-type retenu par l'administration au seul motif, inopérant, qu'elle avait démontré le mauvais état d'entretien de son propre local. Le moyen tiré de ce que le tribunal aurait dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne retenant pas les critiques qu'elle avait formulées à l'encontre du local-type retenu par l'administration doit être écarté dès lors que, dans son jugement, le tribunal ne s'est pas prononcé explicitement sur ces critiques et qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers soumis au juge du fond que ce local-type ne pouvait être retenu comme terme de comparaison. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait commis une erreur de droit en retenant ce local-type ne peut également qu'être écarté.

6. D'autre part, la société Sebimo ne remet pas utilement en cause la motivation du jugement qu'elle attaque en se bornant à reprocher au tribunal administratif de ne pas avoir précisé les raisons pour lesquelles deux des termes de comparaison qu'elle avait proposés n'étaient pas plus appropriés pour la détermination de la valeur locative de son entrepôt, dès lors qu'elle n'a pas soutenu au préalable que le tribunal aurait entaché son jugement d'irrégularité en ne répondant pas, pour les accueillir, à ses critiques dirigées contre le local-type retenu par l'administration.

Sur l'amende pour recours abusif :

7. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ".

8. En jugeant, pour infliger une amende pour recours abusif à la société Sebimo, que ses demandes présentaient à juger un litige qui avait été tranché à de nombreuses reprises par la juridiction administrative et revêtaient ainsi, en l'absence d'éléments nouveaux, un caractère abusif, le tribunal administratif n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce.

9. Il résulte de ce qui précède que la société Sebimo n'est pas fondée à demander, par les moyens qu'elle invoque, l'annulation du jugement qu'elle attaque. Son pourvoi doit, dès lors, être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Sebimo est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Sebimo et au ministre de l'économie et des finances.