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Ariane Web: Conseil d'État 398661, lecture du 3 mai 2017, ECLI:FR:CECHS:2017:398661.20170503

Décision n° 398661
3 mai 2017
Conseil d'État

N° 398661
ECLI:FR:CECHS:2017:398661.20170503
Inédit au recueil Lebon
4ème chambre
Mme Sara-Lou GERBER, rapporteur
Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public
SCP MONOD, COLIN, STOCLET ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON, avocats


Lecture du mercredi 3 mai 2017
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

MM. D...C...et A...B...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Réunion, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Réunion de statuer sur leurs candidatures en vue de leur mise à disposition croisée auprès de ce SDIS et de celui du département du Rhône et de la métropole de Lyon. Par une ordonnance n° 1600223 du 25 mars 2016, le juge des référés a, d'une part, enjoint au SDIS de la Réunion de procéder, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à la saisine de la commission administrative paritaire pour l'examen de leurs candidatures et, d'autre part, enjoint à la présidente du conseil d'administration du SDIS de la Réunion de statuer sur ces candidatures dans un délai de cinq jours à compter de l'avis de la commission administrative paritaire et sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 avril, 22 avril et 10 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SDIS de la Réunion demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter les demandes de MM. C... etB... ;

3°) de mettre à la charge de MM. C... et B...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2008-580 du 18 juin 2008 ;
- le décret n° 89-229 du 17 avril 1989 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, auditeur,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Réunion et à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. C...et de M. B...;



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que MM. C...etB..., sergents-chefs des sapeurs-pompiers respectivement en poste auprès du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Réunion et du service d'incendie et de secours du département du Rhône et de la métropole de Lyon, se sont portés candidats pour bénéficier de mises à disposition " croisées " consistant à les permuter sur leurs deux postes ; que, par une ordonnance du 25 mars 2016 contre laquelle le SDIS de la Réunion se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de la Réunion, saisi par MM. C... et B...sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, a enjoint au SDIS de la Réunion, d'une part de saisir, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, la commission administrative paritaire compétente pour qu'elle donne un avis sur cette opération et, d'autre part, de statuer sur la demande des intéressés dans un délai de cinq jours à compter de l'avis de la commission administrative paritaire, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

2. Considérant que le moyen tiré de ce que la minute de l'ordonnance attaquée n'est pas revêtue de la signature de son auteur manque en fait ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais " ; que, saisi sur le fondement de l'article L. 521-3 d'une demande qui n'est pas manifestement insusceptible de se rattacher à un litige relevant de la compétence du juge administratif, le juge des référés peut prescrire, à des fins conservatoires ou à titre provisoire, toutes mesures que l'urgence justifie, notamment sous forme d'injonctions adressées à l'administration, à la condition que ces mesures soient utiles et ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu'en raison du caractère subsidiaire du référé régi par l'article L. 521-3, le juge saisi sur ce fondement ne peut prescrire les mesures qui lui sont demandées lorsque leurs effets pourraient être obtenus par les procédures de référé régies par les articles L. 521-1 et L. 521-2 ; qu'enfin, il ne saurait faire obstacle à l'exécution d'une décision administrative, même celle refusant la mesure demandée, à moins qu'il ne s'agisse de prévenir un péril grave ;

4. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qu'allègue le pourvoi, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu'à la suite des candidatures présentées parallèlement par MM. C...etB..., chacune des administrations concernées leur a fait part d'une réponse favorable au principe de leurs mises à disposition " croisées " et les a invités à engager les démarches nécessaires à leurs réalisations ; qu'ainsi, en l'absence de toute décision de refus, même implicite, opposée à M. C...ou à M.B..., le SDIS de la Réunion n'est pas fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée serait entachée d'erreur de droit pour avoir fait obstacle à l'exécution d'une décision administrative ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en estimant que la demande de MM. C... et B...présentait un caractère urgent en raison des dépenses qu'ils avaient déjà exposées afin de pouvoir rejoindre, à la date qui leur était indiquée comme probable, leurs nouvelles affectations, le juge des référés a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a, par une ordonnance suffisamment motivée sur ce point, pas commis d'erreur de droit ;

6. Considérant, enfin, qu'en ordonnant seulement que la commission administrative paritaire compétente soit saisie pour avis des candidatures des intéressés et qu'il soit ensuite statué sur celles-ci, le juge de référés n'a pas méconnu le caractère provisoire des mesures prononcées sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-1 du code de justice administrative ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SDIS de la Réunion n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par suite, être également rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge une somme de 2 000 euros chacun à verser à MM. C...et B...au titre de ces mêmes dispositions ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du service départemental d'incendie et de secours de la Réunion est rejeté.
Article 2 : Le service départemental d'incendie et de secours de la Réunion versera à MM. C... et B...une somme de 2 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au service départemental d'incendie et de secours de la Réunion, à M. D... C...et à M. A... B....