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Ariane Web: Conseil d'État 411352, lecture du 12 juin 2017, ECLI:FR:CEORD:2017:411352.20170612

Décision n° 411352
12 juin 2017
Conseil d'État

N° 411352
ECLI:FR:CEORD:2017:411352.20170612
Inédit au recueil Lebon



Lecture du lundi 12 juin 2017
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion (SAFPTR) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à la commune de Cilaos, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'autoriser la participation de trois agents, Mme D...C..., M. A... E...et M. F...B...en leur qualité de membres titulaires ou suppléants du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, à la formation prévue à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017.

Par une ordonnance n° 1700492 du 8 juin 2017, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 9 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'enjoindre à la commune de Cilaos, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de prendre, dans un délai de 24 heures à compter de l'ordonnance à intervenir, toute disposition pour que Mme D...C..., M. A...E...et M. F...B...puissent participer, avec prise en charge financière de la commune, à la formation prévue à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie ;
- l'ordonnance contestée est entachée d'irrégularité, dès lors qu'elle ne vise pas la note en délibéré qu'il a produite ;
- elle est entachée d'une dénaturation des faits dès lors que Mme D...C..., M. A... E...et M. F...B...ont présenté une demande de congé pour participer à la formation qu'il organise à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017, leur témoignage en sens contraire lors de l'audience du 8 juin 2017 ayant été fait sous la pression du maire de la commune de Cilaos ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté syndicale ;
- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors que le juge des référés a refusé au syndicat de prendre la parole au motif que les débats étaient clos.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 23-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;
- le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ;
- le décret n° 2016-1624 du 29 novembre 2016 ;
- le code de justice administrative ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en considération les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions, issues de la loi du 20 avril 2016, du 7° bis de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, que le fonctionnaire territorial en activité a droit " à un congé avec traitement, d'une durée maximale de deux jours ouvrables pendant la durée de son mandat, s'il est représentant du personnel au sein de l'instance compétente en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail. Ce congé est accordé, sur demande du fonctionnaire concerné, afin de suivre une formation en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail au sein de l'organisme de formation de son choix. La charge financière de cette formation incombe aux collectivités territoriales et aux établissements publics " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 10 juin 1985, issu du décret du 29 novembre 2016 : " Les représentants du personnel dans les organismes compétents en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail régis par le titre IV bénéficient d'une formation d'une durée minimale de cinq jours au cours du premier semestre de leur mandat. Cette formation est renouvelée à chaque mandat. (...) Pour deux des jours de formation, le représentant du personnel bénéficie du congé pour formation en matière d'hygiène et de sécurité au travail prévu au 7° bis de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée dans les conditions prévues à l'article 8-1 du présent décret. ". Aux termes de l'article 8-1 du même décret : " Le congé pour formation en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail prévu au 7° bis de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précitée ne peut être accordé que pour suivre une formation prévue à l'article précédent et dans les conditions qu'il prévoit sous réserve des dispositions du présent article. / Ce congé, d'une durée maximale de deux jours ouvrables, peut être utilisé en deux fois. / L'agent choisit la formation et, parmi les organismes visés au quatrième alinéa de l'article 8, l'organisme de formation. / La demande de congé est adressée par écrit à l'autorité territoriale au moins un mois avant le début de la formation. La demande précise la date à laquelle l'agent souhaite prendre son congé ainsi que le descriptif et le coût de la formation, le nom et l'adresse de l'organisme de formation choisis par l'agent. / Le bénéfice de ce congé ne peut être refusé par l'autorité territoriale que si les nécessités du service s'y opposent. (...) L'autorité territoriale saisie est tenue de répondre à la demande de l'agent au plus tard le quinzième jour qui précède le début de la formation. / Les dépenses afférentes à la formation suivie pendant le congé sont prises en charge par l'autorité territoriale dans les conditions prévues à l'article R. 4614-34 du code du travail. (...) " ;

4. Considérant que le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion (SAFPTR) a saisi le juge des référés du tribunal administratif de la Réunion, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Saint-Pierre d'autoriser la participation de trois agents de la commune de Cilaos, membres du SAFPTR, en leur qualité de représentants du personnel au sein du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) à la formation prévue à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017. Par une ordonnance n° 1700492 du 8 juin 2017, le juge des référés a rejeté sa demande. Par la présente requête, le SAFPTR relève appel de cette ordonnance ;

5. Considérant qu'il ressort du dossier de la procédure que la note en délibéré produite par le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion devant le tribunal administratif de la Réunion a été enregistrée après la signature de l'ordonnance attaquée et n'avait ainsi pas à être visée dans cette dernière ; que le moyen tiré du défaut de visas doit, par suite, être écarté ;

6. Considérant que le syndicat requérant n'apporte aucun élément permettant de considérer que le juge des référés de première instance aurait porté atteinte au caractère contradictoire de l'audience ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des attestations versées par les intéressés au dossier et des déclarations faites par ces derniers au cours de l'audience publique devant le tribunal, dont le syndicat requérant allègue, sans apporter le moindre commencement de preuve, qu'elles ne seraient pas sincères, que Mme D...C..., M. A... E...et M. F... B...n'ont pas présenté de demande de congé pour participer à la formation prévue à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017, malgré la proposition qui leur avait été faite en ce sens par le syndicat requérant ; que, dès lors, les conclusions du syndicat tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Cilaos d'autoriser les intéressés à participer à cette formation ne peuvent qu'être rejetées ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel du Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion ne peut être accueilli ; que, par suite, sa requête, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative.



O R D O N N E :
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Article 1er : La requête du Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion.