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Ariane Web: Conseil d'État 411381, lecture du 13 juin 2017, ECLI:FR:CEORD:2017:411381.20170613

Décision n° 411381
13 juin 2017
Conseil d'État

N° 411381
ECLI:FR:CEORD:2017:411381.20170613
Inédit au recueil Lebon



Lecture du mardi 13 juin 2017
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion (SAFPTR) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à la commune de Petite-Ile, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'autoriser la participation de six agents, M. J... E..., Mme M...G..., M. B...D..., M. H...F..., M. A... K...et Mme I...C..., en leur qualité de membres titulaires ou suppléants du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, à la formation prévue à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017.

Par une ordonnance n° 1700491 du 8 juin 2017, le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a, en premier lieu, prononcé le non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête en tant qu'elles concernent Mme I...C...et Mme L...G..., en deuxième lieu, enjoint à la commune de Petite-Ile de prendre toutes dispositions pour que M. A... K...puisse participer, avec prise en charge par la commune, à la formation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail organisée à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017 et, en dernier lieu, rejeté le surplus des conclusions.

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance en tant qu'elle ne fait pas droit à ses conclusions ;

2°) d'enjoindre à la commune de Petite-Ile, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de prendre, dans un délai de 24 heures à compter de l'ordonnance à intervenir, toute disposition pour que les six membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, notamment M. H...F...et Mme L...G..., puissent participer, avec prise en charge de la commune, à la formation prévue à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie ;
- l'ordonnance contestée est entachée d'une erreur de fait en ce que, d'une part, elle a considéré que M. F...avait déjà suivi une formation les 7, 9 et 10 juin 2015 et au mois de mai 2017, alors que tel n'est pas le cas et que, en tout état de cause, la formation suivie en 2015 ne répond pas aux exigences prévues par le décret n° 2016-1624 du 29 novembre 2016, lequel n'était pas alors applicable, d'autre part, il n'est pas justifié que Mme L...G...aurait suivi une telle formation ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté syndicale.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 23-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;
- le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ;
- le décret n° 2016-1624 du 29 novembre 2016 ;
- le code de justice administrative ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en considération les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions, issues de la loi du 20 avril 2016, du 7° bis de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, que le fonctionnaire territorial en activité a droit " à un congé avec traitement, d'une durée maximale de deux jours ouvrables pendant la durée de son mandat, s'il est représentant du personnel au sein de l'instance compétente en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail. Ce congé est accordé, sur demande du fonctionnaire concerné, afin de suivre une formation en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail au sein de l'organisme de formation de son choix. La charge financière de cette formation incombe aux collectivités territoriales et aux établissements publics " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 10 juin 1985, issu du décret du 29 novembre 2016 : " Les représentants du personnel dans les organismes compétents en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail régis par le titre IV bénéficient d'une formation d'une durée minimale de cinq jours au cours du premier semestre de leur mandat. Cette formation est renouvelée à chaque mandat. (...) Pour deux des jours de formation, le représentant du personnel bénéficie du congé pour formation en matière d'hygiène et de sécurité au travail prévu au 7° bis de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée dans les conditions prévues à l'article 8-1 du présent décret " ; qu'aux termes de l'article 8-1 du même décret : " Le congé pour formation en matière d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail prévu au 7° bis de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précitée ne peut être accordé que pour suivre une formation prévue à l'article précédent et dans les conditions qu'il prévoit sous réserve des dispositions du présent article. / Ce congé, d'une durée maximale de deux jours ouvrables, peut être utilisé en deux fois. / L'agent choisit la formation et, parmi les organismes visés au quatrième alinéa de l'article 8, l'organisme de formation. / La demande de congé est adressée par écrit à l'autorité territoriale au moins un mois avant le début de la formation. La demande précise la date à laquelle l'agent souhaite prendre son congé ainsi que le descriptif et le coût de la formation, le nom et l'adresse de l'organisme de formation choisis par l'agent. / Le bénéfice de ce congé ne peut être refusé par l'autorité territoriale que si les nécessités du service s'y opposent. (...) L'autorité territoriale saisie est tenue de répondre à la demande de l'agent au plus tard le quinzième jour qui précède le début de la formation. / Les dépenses afférentes à la formation suivie pendant le congé sont prises en charge par l'autorité territoriale dans les conditions prévues à l'article R. 4614-34 du code du travail. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction diligentée par le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion en première instance que six agents de la commune de Petite-Ile, membres du Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion (SAFPTR), ont adressé au maire, en leur qualité de représentants du personnel, titulaires ou suppléants, au sein du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), une demande de congé afin de participer à la formation organisée les 14 et 15 juin 2017 à Saint-Pierre par l'institut de formation syndicale Fédération autonome de la fonction publique territoriale / SAFPTR ; que le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion a saisi le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Petite-Ile d'autoriser la participation de ces agents à la formation ; que, par une ordonnance n° 1700491 du 8 juin 2017, le juge des référés a, en premier lieu, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande en tant qu'elles concernent Mme I... C...et Mme L... G..., en deuxième lieu, enjoint à la commune de Petite-Ile de prendre toutes dispositions pour que M. A...K...puisse participer, avec prise en charge par la commune, à la formation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail organisée à Saint-Pierre les 14 et 15 juin 2017 et, en dernier lieu, rejeté le surplus des conclusions ; que le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion n'est recevable à demander l'annulation de cette ordonnance qu'en tant qu'elle n'a pas fait intégralement droit à ses conclusions de première instance ;

5. Considérant que l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative est subordonné au caractère grave et manifeste de l'illégalité à l'origine d'une atteinte à une liberté fondamentale ; qu'en l'espèce, pour justifier d'une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté syndicale des six agents concernés, le Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion soutient que le refus opposé par le maire à la demande de formation de ces agents les prive du bénéfice des deux jours de formation prévus par l'article 57-7 de la loi du 26 janvier 1984 ; que, toutefois, en premier lieu, il résulte de l'instruction que M. F...a été mis en mesure de bénéficier ou a effectivement bénéficié de la formation prévue par les dispositions des articles 8 et 8-1 du décret du 10 juin 1985 les 7, 9 et 10 avril 2015 ainsi que les 4 et 5 mai 2017 ; que, dès lors, comme l'a jugé à bon droit le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion, les dispositions de la loi du 20 avril 2016 et du décret du 20 novembre 2016 n'ayant pas eu pour effet de créer un nouveau droit à congé au-delà des cinq jours prévus par les dispositions de l'article 8 du décret du 10 juin 1985, l'intéressé ne pouvait se prévaloir d'un droit à un nouveau congé de deux jours ; qu'en deuxième lieu, il résulte d'un courrier du 8 juin 2017 que la demande de formation de Mme G...a été acceptée par le maire de la commune de Petite-Ile ; que, dès lors, c'est à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de La Réunion a considéré qu'il n'y avait lieu de statuer sur les conclusions du syndicat requérant en tant qu'elles concernent cet agent ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel du Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion ne peut être accueilli ; que, par suite, sa requête, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative ;



O R D O N N E :
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Article 1er : La requête du Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion.
Copie en sera adressée à la commune de Petite-Ile.