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Ariane Web: Conseil d'État 400551, lecture du 4 octobre 2017, ECLI:FR:CECHR:2017:400551.20171004

Décision n° 400551
4 octobre 2017
Conseil d'État

N° 400551
ECLI:FR:CECHR:2017:400551.20171004
Inédit au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
M. Clément Malverti, rapporteur
M. Xavier Domino, rapporteur public


Lecture du mercredi 4 octobre 2017
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 9 juin et 31 août 2016 et les 1er février et 26 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la région Pays de la Loire demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'avis n° 2016-041 de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières du 5 avril 2016 relatif au projet de décision de la région Pays de la Loire de limitation du service déclaré par la société Eurolines sur la liaison entre Angers et Le Mans ;

2°) d'enjoindre à l'Autorité de réexaminer le projet de la région de limitation du service déclaré par la société Eurolines et d'émettre un nouvel avis dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat ;

3°) de mettre à la charge de l'Autorité la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des transports ;
- le décret n° 85-891 du 16 août 1985 ;
- le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Clément Malverti, auditeur,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public ;




1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3111-17 du code des transports, issu de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques : " Les entreprises de transport public routier de personnes établies sur le territoire national peuvent assurer des services réguliers interurbains " ; qu'aux termes de l'article L. 3111-18 de ce code : " Tout service assurant une liaison dont deux arrêts sont distants de 100 kilomètres ou moins fait l'objet d'une déclaration auprès de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, préalablement à son ouverture. L'autorité publie sans délai cette déclaration. / Une autorité organisatrice de transport peut, après avis conforme de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, dans les conditions définies à l'article L. 3111-19, interdire ou limiter les services mentionnés au premier alinéa du présent article lorsqu'ils sont exécutés entre des arrêts dont la liaison est assurée sans correspondance par un service régulier de transport qu'elle organise et qu'ils portent, seuls ou dans leur ensemble, une atteinte substantielle à l'équilibre économique de la ligne ou des lignes de service public de transport susceptibles d'être concurrencées ou à l'équilibre économique du contrat de service public de transport concerné " ;

2. Considérant que la société Eurolines a déposé auprès de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, le 7 décembre 2015, une déclaration portant sur un service régulier interurbain de transport par autocar entre Le Mans et Angers visant à réaliser deux dessertes par jour depuis chacune de ces villes, auxquelles s'ajoute une troisième desserte, au départ d'Angers, les jeudis, vendredis et dimanches et, au départ du Mans, les lundis, vendredis et samedis ; que la région Pays de la Loire a saisi l'Autorité d'un projet de limitation de ce service à un seul passage quotidien en semaine, avec un passage supplémentaire le week-end dans le sens Angers - Le Mans et un passage supplémentaire uniquement le samedi dans le sens Le Mans - Angers ; que, par un avis n° 2016-041 du 5 avril 2016, l'Autorité a estimé que le service envisagé ne portait pas une atteinte substantielle à l'équilibre économique de la ligne de service public de transport que la région organise au titre du service public des transports express régionaux Pays de la Loire et s'est, dès lors, prononcée défavorablement sur le projet de la région ; que la région Pays de la Loire demande l'annulation pour excès de pouvoir de cet avis ;

Sur la légalité externe :

3. Considérant que, selon l'article L. 1261-2 du code des transports : " Les propositions, avis et décisions de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières sont motivés et rendus publics, sous réserve des secrets protégés par la loi " ; que, contrairement à ce que soutient la région Pays de la Loire, l'avis contesté précise les raisons pour lesquelles l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières a estimé que les services déclarés par la société Eurolines ne pouvaient être regardés comme substituables au service organisé par la région ; que l'avis expose ainsi, de façon suffisamment précise, les considérations de droit et de fait qui ont conduit l'Autorité à émettre un avis défavorable sur le projet de la région de limiter le service déclaré par la société Eurolines ;

Sur la légalité interne :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard aux horaires proposés pour le service de transport par autocar déclaré par la société Eurolines et au temps de parcours en autocar, sensiblement plus élevé que pour le trajet en train, ce service ne correspond pas aux besoins d'une clientèle se déplaçant fréquemment, en particulier pour des déplacements entre le domicile et le lieu de travail et que l'incidence de l'ouverture du service de transport par autocar devrait demeurer faible pour les voyageurs occasionnels ; que, dès lors, l'Autorité a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que le service déclaré par la société Eurolines ne pouvait être regardé comme substituable au service de transport organisé par la région et n'était ainsi pas susceptible de porter atteinte à l'équilibre économique de ce dernier ; qu'en l'absence de substituabilité, la région ne saurait utilement soutenir que l'Autorité aurait dû prendre en compte l'incidence cumulée des services ayant déjà fait l'objet d'une déclaration auprès d'elle ou que l'Autorité aurait, à tort, estimé que la liaison Angers - Le Mans s'inscrivait entièrement dans la ligne Nantes - Angers - Le Mans ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la région Pays de la Loire n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'avis qu'elle attaque ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre des mêmes dispositions par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières ;


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la région Pays de la Loire est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la région Pays de la Loire, à la société Eurolines et à l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières.
Copie en sera adressée au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.


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