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Ariane Web: Conseil d'État 403029, lecture du 5 février 2018, ECLI:FR:Code Inconnu:2018:403029.20180205
Decision n° 403029
Conseil d'État

N° 403029
ECLI:FR:CECHR:2018:403029.20180205
Mentionné aux tables du recueil Lebon
1ère et 4ème chambres réunies
M. Frédéric Pacoud, rapporteur
M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public
SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL ; SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT, ROBILLOT, avocats


Lecture du lundi 5 février 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. A...D...et M. et Mme C...et Bénédicte B...ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir deux permis de construire délivrés les 15 novembre 2013 et 27 mars 2014 et un permis modificatif délivré le 10 mars 2014 par le maire de la commune d'Anglet à la société Roxim Management en vue de la construction d'un bâtiment d'habitation collective, ainsi que les décisions rejetant leurs recours gracieux contre ces permis. Par un jugement nos 1401112 et 1401724 du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Pau a annulé ces arrêtés ainsi que les décisions rejetant leurs recours gracieux.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 30 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Roxim Management demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau ;

2°) de mettre à la charge de M. D...et de M. et Mme B...la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2012-11 du 5 janvier 2012 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Pacoud, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de la société Roxim Management et à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, Robillot, avocat de M. A...D...et de M. et MmeB....



Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 5 juillet 2016, le tribunal administratif de Pau a annulé, à la demande de M. D...et de M. et MmeB..., voisins du projet, les trois permis de construire délivrés les 15 novembre 2013, 10 mars 2014 et 27 mars 2014 par le maire de la commune d'Anglet à la société Roxim Management, en vue de la construction d'un bâtiment d'habitation collective, le deuxième permis modifiant le premier et le troisième se substituant aux deux premiers. Pour annuler ces trois permis, les premiers juges se sont fondés sur deux motifs, tirés de la méconnaissance des articles UA 14 et UA7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, fixant pour l'un des règles de densité des constructions et pour l'autre des règles de retrait par rapport aux limites séparatives. Par le présent pourvoi, la société Roxim Management demande l'annulation de ce jugement.

2. Selon les dispositions de l'article L. 127-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur, issue de l'ordonnance du 5 janvier 2012 : " Le règlement peut délimiter des secteurs à l'intérieur desquels la réalisation de programmes de logements comportant des logements locatifs sociaux au sens de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation bénéficie d'une majoration du volume constructible tel qu'il résulte du coefficient d'occupation des sols ou des règles relatives au gabarit, à la hauteur et à l'emprise au sol. Cette majoration, fixée pour chaque secteur, ne peut excéder 50 %. Pour chaque opération, elle ne peut être supérieure au rapport entre le nombre de logements locatifs sociaux et le nombre total des logements de l'opération. / La partie de la construction en dépassement n'est pas assujettie au versement résultant du dépassement du plafond légal de densité ". Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, sur le fondement de ces dispositions, le conseil municipal de la commune d'Anglet a, par une délibération du 27 septembre 2013 portant modification simplifiée du plan local d'urbanisme, modifié les dispositions de l'article UA 14 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de façon à délimiter les secteurs du territoire communal bénéficiant de la majoration du coefficient d'occupation des sols.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D...et M. et Mme B...invoquaient, avec une précision suffisante, la méconnaissance du coefficient d'occupation des sols fixé par l'article UA 14 du règlement du plan local d'urbanisme, en soutenant que la majoration de ce coefficient n'était pas applicable, alors que la société bénéficiaire des permis et la commune soutenaient au contraire que cette majoration trouvait à s'appliquer, en produisant, pour la première, la délibération du 27 septembre 2013 adoptant la modification simplifiée du plan local d'urbanisme, et en reproduisant, pour la seconde, les nouvelles dispositions de l'article UA 14 qui en résultaient, lesquelles renvoyaient à une annexe 4G du règlement pour la délimitation des secteurs. Pour retenir le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 14, le tribunal administratif de Pau a relevé que ni la société ni la commune n'avaient, alors que le moyen était soulevé par les requérants depuis plusieurs mois, justifié, avant la clôture de l'instruction, de la délimitation des secteurs à l'intérieur desquels la réalisation de programmes de logements comportant des logements locatifs sociaux bénéficiait d'une majoration. La société Roxim Management est fondée à soutenir que le tribunal a ainsi statué au terme d'une procédure irrégulière, faute d'avoir cherché à connaître le contenu de l'annexe délimitant ces secteurs, qui commandait l'applicabilité des dispositions relatives à la majoration du coefficient d'occupation des sols au projet litigieux, soit en prenant directement connaissance de cette annexe à caractère réglementaire, qui, pour une commune de plus de 3 500 habitants, faisait l'objet d'une publication au recueil des actes administratifs de la commune en application des dispositions des articles R. 123-24 et R. 123-25 du code de l'urbanisme, désormais reprises aux articles R. 153-20 et R. 153-21 du même code, soit en demandant à la commune de la produire.

4. Il résulte de ce qui précède que la société Roxim Management est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. Le moyen retenu suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens de son pourvoi.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D..., d'une part, et de M. et MmeB..., d'autre part, une somme de 1 500 euros à verser à la société Roxim Management, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise au même titre à la charge de la société requérante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.


D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 5 juillet 2016 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Pau.
Article 3 : M.D..., d'une part, et M. et MmeB..., d'autre part, verseront à la société Roxim Management une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de M. D...et M. et Mme B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Roxim Management, à M. A... D..., premier dénommé, pour l'ensemble des défendeurs, et à la commune d'Anglet.


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