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Ariane Web: Conseil d'État 411778, lecture du 16 février 2018, ECLI:FR:CECHR:2018:411778.20180216

Décision n° 411778
16 février 2018
Conseil d'État

N° 411778
ECLI:FR:CECHR:2018:411778.20180216
Inédit au recueil Lebon
2ème - 7ème chambres réunies
Mme Louise Bréhier, rapporteur
M. Guillaume Odinet, rapporteur public


Lecture du vendredi 16 février 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu les procédures suivantes :

1/ Sous le numéro 411778, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 juin 2017 et 24 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Fontanil-Cornillon demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2017-608 du 21 avril 2017 relatif à l'extension du champ des dispenses de formalités au titre du code de l'urbanisme ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.





2/ Sous le numéro 411779, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 juin 2017 et 24 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Chanas demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2017-608 du 21 avril 2017 relatif à l'extension du champ des dispenses de formalités au titre du code de l'urbanisme ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................




3/ Sous le numéro 411786, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 juin 2017 et 24 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Chasse-sur-Rhône demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2017-608 du 21 avril 2017 relatif à l'extension du champ des dispenses de formalités au titre du code de l'urbanisme ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................


Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la décision du 6 octobre 2017 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par les communes de Fontanil-Cornillon, Chanas et Chasse-sur-Rhône ;
- le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Louise Bréhier, auditrice,

- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public.





1. Considérant que les communes de Fontanil-Cornillon, Chanas et Chasse-sur-Rhône demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 21 avril 2017 relatif à l'extension du champ des dispenses de formalités au titre du code de l'urbanisme ; qu'il y a lieu de joindre ces trois requêtes, qui sont dirigées contre le même décret, pour statuer par une seule décision ;

Sur les interventions :

2. Considérant que le décret attaqué ajoute un cas de dispense de formalités au titre du code de l'urbanisme ; qu'il n'affecte pas les compétences dévolues au département de l'Isère ; que ce dernier, par suite, ne justifie pas, eu égard à la nature et à l'objet du litige, d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien des requêtes tendant à l'annulation de ce décret ; qu'ainsi ses interventions à l'appui des requêtes ne sont pas recevables ;

Sur les requêtes :

3. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article L. 1211-3 du code général des collectivités territoriales, le comité des finances locales doit être consulté sur les projets de décrets " à caractère financier concernant les collectivités locales " ; que le décret attaqué, qui étend le champ des dispenses de formalités au titre du code de l'urbanisme, ne peut être regardé comme un décret à caractère financier au sens de ces dispositions ; que le moyen tiré de ce que son adoption aurait dû être précédée de la consultation du comité des finances locales ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : " Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, par dérogation aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4, sont dispensés de toute formalité au titre du présent code en raison : / (...) b) De la faible durée de leur maintien en place ou de leur caractère temporaire compte tenu de l'usage auquel ils sont destinés " ; que l'article R.* 421-5 du même code énumère les cas de dispenses de toute formalité au titre du code de l'urbanisme, notamment à raison de la faible durée du maintien en place ou du caractère temporaire des constructions ; qu'il vise ainsi, notamment les constructions implantées pour une durée n'excédant pas trois mois et, pour une durée d'un an, les constructions nécessaires au relogement d'urgence des personnes victimes d'un sinistre ou d'une catastrophe naturelle ou technologique ; que le décret attaqué a ajouté à cet article le cas des constructions " nécessaires à l'hébergement d'urgence des personnes migrantes en vue de leur demande d'asile ", lorsqu'elles sont implantées pour une durée n'excédant pas un an ; qu'en ajoutant à la liste des cas de dispenses de telles constructions qui, ne pouvant être implantées que pour une durée limitée à un an, présentent un caractère temporaire, le décret attaqué n'a pas méconnu les termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme ;

5. Considérant, en troisième lieu, que, par une décision du 6 octobre 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a jugé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité mettant en cause l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait illégal comme fondé sur une disposition législative contraire aux articles 34 et 72 de la Constitution ne peut qu'être écarté ; que les communes requérantes ne peuvent, par ailleurs, utilement soutenir que le décret attaqué, qui met en oeuvre les dispositions de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme, méconnaîtrait par lui-même l'article 72 de la Constitution ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les communes de Fontanil-Cornillon, Chanas et Chasse-sur-Rhône ne sont pas fondées à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 21 avril 2017 ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;


D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions du département de l'Isère ne sont pas admises.

Article 2 : Les requêtes des communes de Fontanil-Cornillon, Chanas et Chasse-sur-Rhône sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée aux communes de Fontanil-Cornillon, Chanas et Chasse-sur-Rhône, au département de l'Isère, au ministre de la cohésion des territoires et au Premier ministre.



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