Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 404446, lecture du 20 février 2018, ECLI:FR:CECHR:2018:404446.20180220

Décision n° 404446
20 février 2018
Conseil d'État

N° 404446
ECLI:FR:CECHR:2018:404446.20180220
Mentionné aux tables du recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
M. Sylvain Monteillet, rapporteur
Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public


Lecture du mardi 20 février 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 13 octobre 2016, 27 octobre 2017 et 6 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association syndicale autorisée (ASA) de Saint-Andiol (Bouches-du-Rhône) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2016-455 du 13 avril 2016 portant actualisation des surtaxes temporaires perçues sur les usagers du canal des Alpines septentrionales et application d'une clause de révision de ces surtaxes, ainsi que la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande du 14 juin 2016 tendant au retrait de ce décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;



Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 151-31 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsque les cahiers des charges des concessions ou les conventions relatives à l'usage de l'eau ne prévoient pas de redevances principales fixées annuellement de façon que les recettes équilibrent les dépenses, les usagers de toute catégorie des canaux d'irrigation ou de submersion sont tenus de payer des redevances complémentaires dont le montant, variable avec les conditions d'utilisation de l'eau et, s'il y a lieu, avec la section du canal où l'eau est utilisée, est fixé par décret, les représentants de l'association des usagers et, pour les entreprises concédées, le concessionnaire entendus ".

2. L'association syndicale autorisée (ASA) de Saint-Andiol demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 13 avril 2016 portant actualisation des surtaxes temporaires perçues sur les usagers du canal des Alpines septentrionales et application d'une clause de révision de ces surtaxes, qui a été pris sur ce fondement des dispositions citées au point précédent, et de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande du 14 juin 2016 tendant au retrait de décret.

3. En l'absence de toute association des usagers d'un canal, il appartient au ministre chargé de l'agriculture, à défaut de pouvoir entendre les représentants d'une telle association, de consulter, à titre de garantie équivalente à celle qui est prévue par l'article L. 151-31 du code rural et de la pêche maritime, les usagers eux-mêmes, le cas échéant par l'intermédiaire des maires des communes dont ils relèvent.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'en l'absence d'association des usagers du canal des Alpines septentrionales, le sous-préfet d'Arles a participé à une réunion d'information, qui était organisée par le syndicat intercommunal auquel ce canal a été concédé, et qui rassemblait essentiellement les maires des communes qui en sont membres, les délégués du syndicat et des représentants des conseils départemental et régional ainsi que de la chambre d'agriculture. Il n'est, toutefois, pas établi que les usagers, alors même qu'ils ne se seraient pas constitués en association, aient pu faire valoir leurs observations avant cette réunion auprès des maires, durant celle-ci ou après qu'elle s'était déroulée. Par suite, ils ont été privés d'une garantie. Ainsi, le moyen tiré de ce que le décret attaqué est entaché d'une irrégularité de procédure est fondé.

5. Il résulte de ce qui précède que l'ASA de Saint-Andiol est fondée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa requête, à demander l'annulation du décret et de la décision implicite qu'elle attaque. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la requérante d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le décret n° 2016-455 du 13 avril 2016 ainsi que la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé de le retirer sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à l'association syndicale autorisée de Saint-Andiol une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association syndicale autorisée de Saint-Andiol, au Premier ministre et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.


Voir aussi