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Ariane Web: Conseil d'État 409324, lecture du 26 avril 2018, ECLI:FR:CECHR:2018:409324.20180426

Décision n° 409324
26 avril 2018
Conseil d'État

N° 409324
ECLI:FR:CECHR:2018:409324.20180426
Mentionné aux tables du recueil Lebon
5ème et 6ème chambres réunies
M. Olivier Rousselle, rapporteur
Mme Laurence Marion, rapporteur public
SCP DIDIER, PINET ; SCP BOUZIDI, BOUHANNA, avocats


Lecture du jeudi 26 avril 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 1er décembre 2014 par laquelle le directeur des hôpitaux universitaires La Pitié Salpêtrière-Charles Foix a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle. Par un jugement n° 1501932 du 13 juillet 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA03629 du 24 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par Mme B...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 mars et 28 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de Mme B...et à la SCP Didier, Pinet, avocat de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., docteur en pharmacie, a été recrutée en qualité de praticien attaché associé dans le service de pharmacie à usage intérieur des hôpitaux universitaires La Pitié Salpêtrière-Charles Foix, à compter du 1er janvier 2012, sous couvert d'un contrat prolongé à plusieurs reprises et, en dernier lieu, pour une durée de trois ans à compter du 1er janvier 2014 ; que, par une décision du 1er décembre 2014, prise après consultation de la commission médicale d'établissement locale (CMEL), le directeur des hôpitaux universitaires La Pitié Salpêtrière-Charles Foix a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ; que, par un jugement du 13 juillet 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ; que, par un arrêt du 24 janvier 2017, contre lequel Mme B...se pourvoit en cassation, la cour administrative de Paris a rejeté son appel dirigé contre ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes des trois premiers alinéas de l'article R. 6152-628 du code de la santé publique : " L'insuffisance professionnelle consiste en une incapacité dûment constatée du praticien à accomplir les travaux ou à assumer les responsabilités relevant normalement des fonctions de praticien attaché./ L'intéressé est avisé par lettre recommandée du directeur de l'établissement avec demande d'avis de réception de l'ouverture d'une procédure d'insuffisance professionnelle. Il reçoit communication de son dossier et est mis à même de présenter ses observations orales et écrites avec l'assistance d'un défenseur de son choix./ Le praticien attaché ou praticien attaché associé qui fait preuve d'insuffisance professionnelle fait l'objet soit d'une modification de la nature de ses fonctions, soit d'une mesure de licenciement avec indemnité. Ces mesures sont prononcées par le directeur de l'établissement après avis de la commission médicale d'établissement ou, le cas échéant, de la commission médicale d'établissement locale " ;

3. Considérant que le principe général des droits de la défense implique que la personne concernée par une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle, après avoir été informée des insuffisances qui lui sont reprochées, soit mise à même de demander la communication de son dossier et ait la faculté de présenter ses observations devant l'autorité appelée à prendre la décision ; que, lorsque les dispositions applicables se bornent à prévoir que cette autorité recueille l'avis d'une instance consultative, le principe des droits de la défense n'exige pas que cette instance entende l'intéressé mais seulement que ses membres aient, préalablement à leur délibération, communication des observations qu'il a pu présenter devant l'autorité compétente ;

4. Considérant que les dispositions de l'article R. 6152-628 du code de la santé publique cité ci-dessus prévoient, d'une part, que le praticien hospitalier est avisé par lettre recommandée du directeur de l'établissement avec demande d'avis de réception de l'ouverture d'une procédure d'insuffisance professionnelle, reçoit communication de son dossier et est mis à même de présenter ses observations orales et écrites avec l'assistance d'un défenseur de son choix et, d'autre part, que le licenciement est prononcé par le directeur de l'établissement après avis de la commission médicale d'établissement prévue par l'article L. 6144-1 du code de la santé publique ou, le cas échéant, de la commission médicale d'établissement locale ; qu'en jugeant qu'il ne résultait ni des dispositions de cet article, ni d'aucune autre disposition en vigueur, ni d'aucun principe général que le praticien attaché associé qui fait preuve d'insuffisance professionnelle devrait être avisé de la réunion de la commission médicale d'établissement, être mis en mesure de présenter ses observations devant elle et avoir communication des éléments soumis à la commission, la cour administrative d'appel de Paris, qui n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure, n'a pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant qu'en jugeant qu'il ne ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis ni que la modification de la nature des fonctions de Mme B...n'aurait pas été envisagée par son employeur, ni que l'appréciation portée par l'administration sur les compétences professionnelles de l'intéressée était erronée, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt, a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine, exempte de dénaturation ; que le licenciement pour insuffisance professionnelle n'ayant pas le caractère d'une sanction, Mme B...ne peut utilement soutenir que la cour aurait dû lui donner cette qualification et examiner s'il était proportionné aux faits qui le justifiaient ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt du 24 janvier 2017 de la cour administrative d'appel de Paris ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme B...la somme que demande l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à ce titre ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme B...est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.


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