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Ariane Web: Conseil d'État 423725, lecture du 6 septembre 2018, ECLI:FR:CEORD:2018:423725.20180906

Décision n° 423725
6 septembre 2018
Conseil d'État

N° 423725
ECLI:FR:CEORD:2018:423725.20180906
Inédit au recueil Lebon

SCP SPINOSI, SUREAU ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN, avocats


Lecture du jeudi 6 septembre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Besançon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'arrêté du 3 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Besançon a interdit, du 9 juillet 2018 au 30 septembre 2018 et du 23 novembre 2018 au 31 décembre 2018, dans un périmètre délimité correspondant au centre de la ville de Besançon, la consommation d'alcool, la mendicité, accompagnée ou non d'animaux, les regroupements, ainsi que la station assise ou allongée lorsqu'elle constitue une entrave à la circulation publique. Par une ordonnance n° 1801454 du 28 août 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Par une requête, enregistrée le 29 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Besançon le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Il soutient que :
- il a intérêt à agir contre l'arrêté litigieux en sa qualité de militant associatif ;
- la condition d'urgence est remplie dès lors que cet arrêté force certaines catégories de personnes vulnérables à s'éloigner ou à quitter la ville de Besançon et rend ainsi plus difficile le travail des associations leur venant en aide ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aider autrui dans un but humanitaire ainsi qu'à la liberté de solliciter l'aide d'autrui qui découleraient du principe de fraternité ;
- l'arrêté litigieux est manifestement disproportionné au regard de la gravité de l'atteinte qui est portée à la liberté d'aider autrui.

Par un mémoire en intervention enregistré le 31 août 2018, la Ligue des droits de l'homme conclut à ce qu'il soit fait droit à l'appel de M. B...tendant à l'annulation de l'ordonnance du 28 août 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon et à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 3 juillet 2018 du maire de Besançon.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2018, la commune de Besançon soutient que les conclusions de la requête ont perdu leur objet et conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions de M.B....

Par un mémoire en réplique, enregistré le 3 septembre 2018, M. B...persiste dans les conclusions de sa requête et demande également la suspension de l'exécution de l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de la commune de Besançon a interdit les activités constitutives de troubles à la tranquillité publique et à l'ordre public sur des secteurs délimités de la ville de Besançon.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et ses protocoles additionnels ;
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;




1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ;

2. Considérant que par une requête enregistrée le 24 août 2018, M. B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Besançon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'arrêté du 3 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Besançon a interdit la consommation d'alcool, la mendicité, accompagnée ou non d'animaux, les regroupements, ainsi que la station assise ou allongée lorsqu'elle constitue une entrave à la circulation publique ; que par une ordonnance du 28 août 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; que M. B...relève appel de cette ordonnance ; que la Ligue des droits de l'homme est intervenue au soutien de cet appel, en tant qu'il porte sur l'arrêté du 3 juillet 2018, et qu'il y a lieu d'admettre cette intervention ;

3. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 31 août 2018, postérieur à l'introduction de la requête de M.B..., le maire de la commune de Besançon a abrogé l'arrêté du 3 juillet 2018 ; que, dans ces conditions, les conclusions d'appel de M. B...tendant à ce que le juge des référés suspende cet arrêté du 3 juillet 2008 sont devenues sans objet, qu'il n'y a dès lors pas lieu d'y statuer ;

4. Considérant, en second lieu, que les conclusions tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de la commune de Besançon a, d'une part, abrogé l'arrêté du 3 juillet 2018 et, d'autre part, interdit les activités constitutives de troubles à la tranquillité publique et à l'ordre public sur des secteurs délimités de la ville de Besançon, sont présentées par M.B..., dans sa réplique, pour la première fois en appel ; qu'elles sont par suite irrecevables ;

5. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B...d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



O R D O N N E :
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Article 1er : L'intervention de la Ligue des droits de l'homme est admise.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B...dirigées contre l'arrêté du maire de Besançon en date du 3 juillet 2018.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. B...est rejeté.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A...B...et à la commune de Besançon.
Copie en sera adressée pour information à la Ligue des droits de l'homme.