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Ariane Web: Conseil d'État 413649, lecture du 3 octobre 2018, ECLI:FR:CECHS:2018:413649.20181003

Décision n° 413649
3 octobre 2018
Conseil d'État

N° 413649
ECLI:FR:CECHS:2018:413649.20181003
Inédit au recueil Lebon
7ème chambre
M. François Lelièvre, rapporteur
M. Olivier Henrard, rapporteur public
GOLDMAN ; SCP ODENT, POULET, avocats


Lecture du mercredi 3 octobre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Mme MalikaC...a demandé au tribunal administratif de Versailles, en premier lieu, d'annuler la décision du 7 octobre 2014 par laquelle la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé la révision de son taux d'invalidité et du montant des pensions correspondant et, en second lieu, de désigner un expert judiciaire médical avec mission de fixer son taux d'incapacité résultant des accidents de service de 2007 et 2010.

Par un jugement n° 1409157 du 13 juin 2017, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 17VE02654 du 22 août 2017, enregistrée le 23 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 10 août 2017 au greffe de cette cour, présenté par MmeC.... Par ce pourvoi et par un nouveau mémoire, enregistré le 16 novembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles du 13 juin 2017 ;

2°) de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 2 000 euros à verser à Me Laurent Goldman, avocat de MmeC..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le décret n° 2001-99 du 31 janvier 2001 ;
- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Goldman Laurent, avocat de Mme C...et à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations.


1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que MmeC..., qui est entrée dans la fonction publique territoriale à compter du 1er avril 1993 en qualité d'adjoint technique principal 2ème classe, a été affectée comme agent polyvalent auprès des services de la restauration collective et de l'entretien des parties communes de la résidence pour personnes âgées " le Coteau " située dans la commune de Viry-Châtillon ; qu'elle a été placée en congé pour des accidents de service survenus le 4 mars 2003, le 12 février 2007 et le 26 mai 2010 ; que, du 30 juin 2012 au 31 janvier 2014, elle a été placée en congé pour accident de service à la suite d'une rechute ; que, le 24 septembre 2013, la commission de réforme a imputé ses douleurs aux précédents accidents de service et l'a reconnu inapte définitivement à tout poste ; qu'à la suite de l'avis favorable de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) rendu le 5 février 2014, Mme C...a été admise à la retraite pour invalidité à compter du 1er février 2014 par arrêté du 6 février 2014 ; que Mme C...a contesté le taux d'invalidité retenu pour la liquidation de sa retraite ; que sa demande a été rejetée par la CNRACL le 7 octobre 2014 ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la CNRACL et à la révision du taux d'invalidité retenu ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande " ; qu'aux termes de l'article 31 du même décret : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions " ; que le I de l'article 34 de ce décret fixe les modalités de calcul de la pension de retraite du fonctionnaire atteint d'une invalidité ; qu'aux termes du II du même article : " Dans le cas d'aggravation d'infirmité préexistante, le taux d'invalidité à retenir pour l'application des dispositions du premier alinéa du I ci-dessus est apprécié par rapport à la validité restante du fonctionnaire " ;

3. Considérant que ces dispositions ont entendu limiter l'application de la règle de la validité restante pour le calcul du taux d'invalidité résultant du cumul d'invalidités à la seule hypothèse de l'aggravation d'infirmités préexistantes ; qu'un tel rapport d'aggravation entre deux infirmités résulte soit d'une relation médicale soit d'un lien fonctionnel entre elles ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que la commission de réforme des fonctionnaires des collectivités locales a rendu, le 19 février 2013, un avis favorable en indiquant qu'après une rechute consolidée le 27 février 2012, elle proposait un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 7 % pour l'accident de service survenu le 12 février 2007 ; que le 24 septembre 2013, la commission de réforme a reconnu l'incapacité absolue et définitive de Mme C...en entérinant les conclusions du rapport du docteur Plantin, médecin agréé, qui concluait à une évaluation de 7 % d'IPP pour une tendinite à l'épaule gauche et de 20 % pour lombalgies et sciatalgies ; que le taux d'invalidité retenu par la CNRACL pour le calcul de la pension a été fixé à 25,60 % sur la base de la méthode de la validité restante, le taux de 20 % ayant été appliqué sur les 93 % de validité restante de l'agent ;

5. Considérant que pour rejeter la demande de Mme Zoutinetendant à la révision du taux d'invalidité arrêté par la CNRACL, le tribunal administratif de Versailles a estimé, sans rechercher s'il existait un rapport d'aggravation entre les différentes infirmités de MmeC..., que devait s'appliquer la règle de la validité restante pour le calcul du taux d'invalidité de Mme C...; qu'en statuant ainsi, le tribunal a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen du pourvoi, son jugement doit être annulé ;

6. Considérant que Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Laurent Goldman, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 2 000 euros à verser à Me Laurent Goldman ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 13 juin 2017 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Versailles.
Article 3 : La Caisse des dépôts et consignations versera à Me Laurent Goldman, avocat de Mme C..., une somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Laurent Goldman renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme MalikaC...et à la Caisse des dépôts et consignations.
Copie en sera adressée au ministre de l'action et des comptes publics.