Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 418830, lecture du 15 octobre 2018, ECLI:FR:CECHS:2018:418830.20181015

Décision n° 418830
15 octobre 2018
Conseil d'État

N° 418830
ECLI:FR:CECHS:2018:418830.20181015
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre
Mme Marie-Laure Denis, rapporteur
M. Louis Dutheillet De Lamothe, rapporteur public
SCP ODENT, POULET, avocats


Lecture du lundi 15 octobre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société LNC Theta Promotion a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 30 août 2017 par laquelle le maire de Saint-Laurent-du-Var, agissant au nom de l'État, a refusé de lui délivrer un permis de construire et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux par le préfet des Alpes-Maritimes et d'enjoindre au maire de Saint-Laurent-du-Var, agissant au nom de l'Etat, de lui délivrer le permis de construire sollicité ou à défaut de procéder à une nouvelle instruction de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 500 euros de retard. Par une ordonnance n° 1800470 du 21 février 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État les 7 mars, 14 mars 2018 et 10 septembre 2018, la société LNC Theta Promotion demande au Conseil d'État, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de suspension ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie-Laure Denis, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la société LNC Theta Promotion.



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 30 août 2017, le maire de Saint-Laurent-du-Var, agissant au nom de l'Etat, a refusé de délivrer à la société LNC Theta Promotion un permis de construire pour la réalisation d'un ensemble d'immeubles d'habitation comprenant 116 logements. Par une ordonnance du 21 février 2018, contre laquelle la société LNC Theta Promotion se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté après avoir estimé qu'aucun des moyens soulevés n'était propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à sa légalité.

2. Il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée que le juge des référés a omis d'examiner le moyen soulevé devant lui par la SNC Theta Promotion et qui n'était pas inopérant, tiré de ce que l'arrêté litigieux avait été signé par une autorité incompétente, l'arrêté portant délégation de signature n'ayant pas été publié. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la SNC Theta Promotion est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation de l'ordonnance.

3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

4. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision.(...). ".

5. En l'état de l'instruction, les moyens tirés de ce que, d'une part, la cote de 12,56 mètres apparaissant sur les plans de la construction correspond à la " hauteur frontale " du bâtiment et non à la " hauteur absolue " telles que définies par le plan local d'urbanisme et, d'autre part, qu'il a été apporté un soin particulier au traitement de la façade sur voie alors que le secteur en cause se caractérise par une hétérogénéité de constructions, paraissent de nature, en l'état de l'instruction, à faire naître un doute sérieux sur la légalité des deux motifs de la décision contestée tirés de la méconnaissance respectivement de l'article UVd10 du règlement du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme. Cependant, il ressort à l'évidence des données de l'affaire, en l'état de l'instruction, que le maire aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que le motif tiré de la méconnaissance de l'article UVd 6 du règlement du plan local d'urbanisme, en raison de la consistance et de la localisation du local poubelle. Les moyens soulevés à l'encontre de ce motif et tirés de ce que le local poubelle n'est soumis ni à permis de construire ni à déclaration préalable, que la marge de retrait de 5 mètres prévue par l'article UVd 6 s'applique aux seuls niveaux situés au-dessus du sol des constructions, alors qu'il n'est pas prévu en l'espèce l'implantation d'un niveau au-dessus du sol dans la marge de retrait de 5 mètres, ne paraissent pas propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, non plus que le moyen tiré de ce que cette décision a été prise par une autorité incompétente, faute pour la commune de rapporter la preuve de la publicité régulière de l'arrêté de délégation pris à l'égard de son auteur, en méconnaissance des dispositions des articles L. 2122-18 et L. 2131-1 du code général des collectivités territoriale. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la condition d'urgence, il y a lieu de rejeter la demande de la société LNC Theta Promotion, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 21 février 2018 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par la société LNC Theta Promotion devant le juge des référés du tribunal administratif de Nice est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société LNC Theta Promotion et à la commune de Saint-Laurent-du-Var.