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Ariane Web: Conseil d'État 415463, lecture du 26 novembre 2018, ECLI:FR:CECHR:2018:415463.20181126

Décision n° 415463
26 novembre 2018
Conseil d'État

N° 415463
ECLI:FR:CECHR:2018:415463.20181126
Inédit au recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
M. Laurent Domingo, rapporteur
M. Romain Victor, rapporteur public
SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ, avocats


Lecture du lundi 26 novembre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société NC Numericable a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy de prononcer, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la délibération du 20 avril 2017 du conseil municipal d'Homécourt relative à l'échéance du lien contractuel entre la commune et la société Numericable. Par une ordonnance n° 1702575 du 19 octobre 2017, le juge des référés a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 et 21 novembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société NC Numericable demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Homécourt la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Nc Numericable et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la commune d'Homécourt.



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Nancy que, par une délibération du 20 avril 2017, le conseil municipal de la commune d'Homécourt a pris acte de l'expiration des deux conventions conclues le 29 avril 1996 avec la société Télédiffusion de France, aux droits de laquelle est venue la société NC Numericable, relatives au réseau câblé de la commune, pris acte du retour gratuit et automatique de l'ensemble des équipements de ce réseau câblé dans le patrimoine de la commune et renvoyé la fixation du terme exact de l'exploitation du service à une date ultérieure. Par un courrier du 7 septembre 2017, le conseil de la commune d'Homécourt, agissant au nom du maire de la commune, a indiqué au conseil de la société Numericable que le terme de l'exploitation du service et la date de reprise effective des réseaux par la commune avaient été fixés au 16 octobre 2017 à midi. La société NC Numericable se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 19 octobre 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande, présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, tendant à la suspension de l'exécution de la délibération du 20 avril 2017 en tant qu'elle prend acte du retour gratuit et automatique de l'ensemble des équipements de ce réseau câblé dans le patrimoine de la commune de Homécourt.

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) ".

3. En premier lieu, il ressort de l'ordonnance attaquée que, pour rejeter la demande de la société NC Numericable tendant à la suspension de l'exécution de la délibération du 20 avril 2017 en tant qu'elle prend acte de ce que la commune est propriétaire des équipements du réseau de télédiffusion par câble, le juge des référés s'est fondé sur ce qu'elle était irrecevable, après avoir relevé que la solution du litige relatif à la propriété de ces équipements était indépendante de l'exécution de cette délibération, qui se bornait à prendre acte de ce que la commune s'estimait propriétaire des équipements. Si le juge des référés a également jugé que la condition d'urgence n'était pas remplie, au motif que les clients du réseau câblé n'étaient pas privés de la réception de la télévision numérique terrestre, ce motif ne peut qu'être regardé, quel qu'en soit le bien-fondé, comme surabondant. Le moyen du pourvoi dirigé contre ce motif est dès lors inopérant.

4. En second lieu, en jugeant irrecevable la demande de suspension de la société requérante pour le motif rappelé au point 3 ci-dessus, le juge des référés, qui n'a pas, contrairement à ce qui est soutenu, en jugeant que le litige entre la commune et la société relevait du juge du contrat, exclu qu'une demande fondée sur l'article L. 521-1 du code de justice administrative puisse être présentée en matière contractuelle, n'a commis aucune erreur de droit ni aucune erreur de qualification juridique, dès lors que la délibération qui lui était soumise, par laquelle, ainsi qu'il a été dit, le conseil municipal " prend acte ... de la propriété gratuite et automatique de l'ensemble des équipements du réseau au profit de la commune ", qui ne pouvait avoir, par elle-même, un quelconque effet translatif de propriété des équipements du réseau de télédiffusion par câble en cause et qui ne faisait qu'exprimer l'interprétation retenue par la commune de la portée des clauses des conventions conclues le 29 avril 1996 avec la société Télédiffusion de France selon laquelle les équipements en cause avaient la nature de biens de retour, était dépourvue d'effets susceptibles d'être suspendus par le juge des référés.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Numericable n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune d'Homécourt qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société NC Numericable la somme de 3 000 euros à verser à la commune d'Homécourt à ce titre.


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société NC Numericable est rejeté.

Article 2 : La société NC Numericable versera une somme de 3 000 euros à la commune d'Homécourt au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société NC Numericable et à la commune d'Homécourt.