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Ariane Web: Conseil d'État 406617, lecture du 3 décembre 2018, ECLI:FR:CECHR:2018:406617.20181203

Décision n° 406617
3 décembre 2018
Conseil d'État

N° 406617
ECLI:FR:CECHR:2018:406617.20181203
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
Mme Séverine Larere, rapporteur
Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public
CABINET BRIARD, avocats


Lecture du lundi 3 décembre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société Manpower France Holding a demandé au tribunal administratif de Montreuil :
1°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale, des intérêts de retard et majorations auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007 pour un montant de 19 786 630 euros et d'ordonner le versement d'intérêts moratoires ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale, des intérêts de retard et majorations auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 pour un montant de 5 660 873 euros et d'ordonner le versement d'intérêts moratoires et, à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration de 80 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts dont ont été assorties ces impositions ;
3°) de prononcer la décharge de la retenue à la source ainsi que des intérêts de retard et majorations auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2006 pour un montant de 1 657 819 euros et d'ordonner le versement d'intérêts moratoires.

Par un jugement nos 1309422, 1309429, 1310188 du 1er décembre 2014, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 15VE00355 du 3 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Manpower France Holding contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 janvier 2017, 4 avril 2017 et 26 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Manpower France Holding demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au cabinet Briard, avocat de la société Manpower France Holding.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 21 novembre 2018, présentée par la société Manpower France Holding ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, dans le cadre de la restructuration du groupe Manpower, la société de droit américain Manpower Inc., société mère de ce groupe a, en décembre 2003, cédé à la société danoise Manpower Europe Holdings APS les titres de sa filiale française, la société par actions simplifiée (SAS) Manpower France devenue entre-temps Manpower France Holding, dont elle détenait 99,31 % du capital, moyennant un prix de 315 millions d'euros et des titres de la société danoise. Le 29 décembre 2003, l'assemblée générale ordinaire et extraordinaire de la SAS Manpower France a décidé de procéder à une distribution exceptionnelle de dividendes d'un montant de 317 millions d'euros, par prélèvement sur le poste " Autres réserves ", dont 315 millions d'euros au profit de son nouvel actionnaire danois. Au cours de la même assemblée générale, les actionnaires de la SAS Manpower France ont décidé d'émettre des obligations remboursables en actions (ORA) pour un montant total de 317 millions d'euros, souscrites à hauteur de 315 millions d'euros par la société danoise Manpower Holdings APS. Ces obligations, émises pour une durée de sept ans, étaient rémunérées par des intérêts fixés à un taux de marché mais plafonnés, pour chaque exercice, à un niveau égal à la somme algébrique des résultats comptables de la SAS Manpower France et de ses filiales détenues à plus de 95 %, avant impôts et intérêts dus au titre des ORA. Le 31 décembre 2003, la société danoise Manpower Europe Holdings APS s'est libérée de la dette contractée envers Manpower Inc. à l'occasion de l'acquisition des titres de la société française par la cession de l'intégralité des ORA émises par la SAS Manpower France qu'elle détenait.

2. A l'issue de deux vérifications de la comptabilité de la SAS Manpower France Holding, portant respectivement sur les exercices clos en 2003 et 2004 et sur les exercices clos en 2005, 2006 et 2007, l'administration fiscale a remis en cause, selon la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, la déduction des intérêts rémunérant les ORA émises le 29 décembre 2003, estimant que la décision de procéder concomitamment à une distribution exceptionnelle de dividendes prélevés sur les réserves et à une émission d'ORA pour le même montant avait été prise dans le seul but de faire naître des charges d'intérêts déductibles pour la société Manpower France et d'atténuer ainsi sa charge fiscale. Les sommes réintégrées à ce titre dans les résultats de la société ont donné lieu à des suppléments d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et de contribution sociale, qui ont été assortis, s'agissant des exercices clos de 2005 à 2007, de la majoration de 80 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts. Elles ont, par ailleurs, été regardées comme des revenus distribués et ont été soumises, pour l'année 2006, à retenue à la source en application des dispositions du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts. La société Manpower France Holding ayant contesté l'ensemble des impositions et pénalités résultant de ce redressement, le tribunal administratif de Montreuil a, par un jugement du 1er décembre 2014, rejeté ses demandes. Par l'arrêt attaqué du 3 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Versailles a confirmé ce jugement, estimant, conformément à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal, que, par la réalisation concomitante d'une distribution exceptionnelle de dividendes et d'une émission d'ORA souscrites par le bénéficiaire de cette distribution, la société avait, en l'espèce, poursuivi un but exclusivement fiscal et que l'application littérale de l'article 39 du code général des impôts, dont elle se prévalait, était, dans les circonstances en cause, contraire à l'intention de ses auteurs.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. Aux termes, d'une part, de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à la procédure de rectification relative aux années 2004 et 2005 : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses :/ (...) b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...)./ L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel./ Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification ". Dans sa rédaction applicable à la procédure de rectification relative aux années 2006 et 2007, ce même article dispose : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles./ En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité./ Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification (...) ".

4. Aux termes, d'autre part, de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...)./ 3° Les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans (...) ". Aux termes de l'article 212 du même code dans sa rédaction applicable aux exercices clos en 2004, 2005 et 2006 : " Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues au 3° du 1 de l'article 39 (...) ". Aux termes du même article dans sa rédaction applicable à l'exercice clos en 2007 : " I. - Les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise par une entreprise liée directement ou indirectement au sens du 12 de l'article 39 sont déductibles dans la limite de ceux calculés d'après le taux prévu au premier alinéa du 3° du 1 de l'article 39 ou, s'ils sont supérieurs, d'après le taux que cette entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues (...) ".

5. En premier lieu, si les juges d'appel ont énoncé que la société de droit américain Manpower Inc. avait, en décembre 2003, " apporté " à la société danoise Manpower Europe Holdings APS des titres de sa filiale française, ils ont exactement analysé la portée de cette opération en relevant qu'elle n'avait été que pour partie rémunérée par des titres de la société danoise et que celle-ci s'était, pour le surplus, endettée à l'égard de sa mère américaine à hauteur de 315 millions d'euros, puis en observant qu'elle s'était ultérieurement acquittée de cette dette en lui cédant l'intégralité des ORA émises par la société Manpower France qu'elle avait souscrites. Les moyens tirés de ce que la cour aurait dénaturé les faits qui lui étaient soumis ou entaché son arrêt de contradiction de motifs ne peuvent, dès lors, qu'être écartés.

6. En deuxième lieu, la cour a jugé que la contribuable ne pouvait utilement se prévaloir de ce que l'émission obligataire à laquelle elle avait procédé ne lui aurait procuré aucun avantage fiscal par rapport à un dividende conservé en compte courant dont les intérêts auraient été déductibles sur le fondement des dispositions précitées du 3° du 1 de l'article 39 et de l'article 212 du code général des impôts. En estimant ainsi que la circonstance, à la supposer établie, qu'auraient été respectées les limites de taux fixées à l'article 212 qui auraient été applicables si les sommes distribuées avaient été laissées sur un compte courant n'était pas de nature à faire obstacle à ce que les opérations concomitantes de distribution de dividendes et d'émission d'ORA en litige soient regardées comme constitutives d'un abus de droit au sens de l'article L. 64 précité du livre des procédures fiscales, la cour, qui ne s'est pas méprise sur la portée des écritures dont elle était saisie, n'a commis aucune erreur de droit.

7. La société Manpower France Holding conteste, en troisième lieu, les motifs par lesquels les juges d'appel ont estimé qu'elle n'établissait pas avoir poursuivi, en réalisant les opérations litigieuses de distribution de dividendes prélevés sur les réserves et d'émission concomitante d'ORA, un but autre que celui de pouvoir déduire de ses résultats imposables des charges d'intérêts.

8. C'est cependant sans dénaturer les faits qui lui étaient soumis que la cour a relevé qu'il résultait de l'instruction que les opérations concomitantes de distribution de dividendes et d'émission, pour un montant presque équivalent, d'ORA ne s'étaient par elles-mêmes traduites par aucun changement dans l'actionnariat de la société Manpower France, dès lors que la société restait dans l'immédiat détenue, à hauteur de 99,31 % de son capital, par la société Manpower Holdings Europe APS et, à hauteur des 0,69 % restants, par la société Manpower Public Company Ltd, et que les ORA avaient été souscrites par ces actionnaires à hauteur de leurs quotes-parts respectives dans son capital social. La cour n'a pas davantage dénaturé les faits en jugeant que ces opérations n'avaient pas affecté la structure du bilan, eu égard à la nature des ORA, qui relèvent comptablement de la catégorie des fonds propres, et à leur durée, en l'espèce limitée à sept ans.

9. La contribuable soutient, par ailleurs qu'elle a bénéficié d'un taux d'intérêt plus faible que celui qu'elle aurait obtenu dans le cadre d'un emprunt bancaire. Mais la cour n'a pas commis d'erreur de droit en écartant cet argument comme inopérant pour l'identification des buts qui avaient pu être poursuivis par la réalisation d'une opération ayant consisté, ainsi qu'il a été dit, plutôt qu'à incorporer directement au capital des réserves qui n'auraient donné lieu qu'au versement de dividendes non déductibles, à permettre à la société danoise Manpower Europe Holdings APS de réinvestir immédiatement dans la société Manpower France, grâce à un instrument financier donnant accès au capital, les réserves dans lesquelles avaient été prélevés les dividendes qui lui avaient, immédiatement auparavant, été distribués.

10. Il est encore soutenu que la cour aurait dénaturé les faits de l'espèce en méconnaissant l'intérêt qui s'attachait à la restructuration du groupe permise par l'opération litigieuse, en ce que, notamment, les ORA, que la société américaine Manpower Inc. avait finalement acquises, offraient à cette dernière la faculté de les céder à un tiers sans pour autant perdre, dans l'immédiat, le contrôle de la société française dont elle était déjà actionnaire auparavant, ce qui n'aurait pas été possible dans l'hypothèse où les sommes en cause seraient restées investies dans la société sous forme de fonds propres et où la société danoise lui aurait cédé les actions correspondantes plutôt que des ORA. Dès lors toutefois qu'il n'est pas allégué que cette faculté aurait été mise en oeuvre par la société Manpower Inc., le moyen ne peut qu'être écarté.

11. Enfin la cour, qui n'avait pas à rechercher si les intérêts versés à la société Manpower Inc. avaient été imposés aux Etats-Unis, ne s'est pas non plus fondée, contrairement à ce qui est soutenu, sur le caractère fictif de la société danoise Manpower Europe Holdings Europe APS, mais s'est bornée à relever sa " création ad hoc " dans le cadre de la restructuration des filiales européennes du groupe. Elle a pu, sans erreur de droit, relever, parmi d'autres éléments, que les opérations litigieuses ne s'étaient traduites par aucun mouvement financier. Elle n'a pas méconnu le principe de liberté de gestion des entreprises dans le choix de leur mode de financement dès lors que ce n'est pas le choix de financer une distribution de dividendes par le recours à l'emprunt qui a été regardé comme constitutif d'un abus de droit, mais la réalisation concomitante, en l'absence de tout motif autre que celui d'atténuer les charges fiscales, d'une distribution de dividendes et de l'émission d'ORA souscrites par l'actionnaire.

12. Il résulte de ce qui précède que la cour n'a ni dénaturé les faits, ni commis d'erreur de droit ou de qualification juridique en écartant la justification tirée de ce que les opérations litigieuses n'avaient pas eu un but exclusivement fiscal.

13. Contrairement à ce que soutient en quatrième et dernier lieu la société Manpower France Holding, la cour a vérifié, avant de conclure à l'existence d'un abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, si l'application littérale de l'article 39 du code général des impôts revendiquée par la contribuable allait en l'espèce à l'encontre des objectifs poursuivis par ses auteurs. Son arrêt n'est donc pas entaché d'erreur de droit et c'est sans insuffisance de motivation qu'ayant explicité le caractère artificiel des opérations litigieuses, elle a regardé cette condition comme satisfaite.

Sur les pénalités :

14. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux rectifications opérées au titre des exercices clos en 2005 à 2007 : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de :/ (...) b. 80 % en cas (...) d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (...) ".

15. Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable./ Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations ". Il résulte de ces dispositions que l'administration a l'obligation, au moins trente jours avant la mise en recouvrement de pénalités visées par le second alinéa de l'article L. 80 D précité, d'adresser au contribuable un document comportant la motivation des pénalités qu'elle envisage de lui appliquer et indiquant qu'il dispose d'un délai de trente jours pour présenter ses observations. L'administration n'est tenue de renouveler cette formalité que si, pour quelque motif que ce soit, elle modifie, avant leur mise en recouvrement, la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités qu'elle se propose d'appliquer au contribuable.

16. Si la société requérante fait valoir que la proposition de rectification comportant la motivation ainsi exigée lui a été adressée en sa qualité de société intégrée alors que c'est en sa qualité de société mère qu'elle est redevable des impositions en litige et qu'en cette qualité elle a été informée moins de trente jours avant la mise en recouvrement, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie dès lors qu'il s'agissait de la même personne morale. D'autre part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que ni la base légale, ni la qualification, ni les motifs des pénalités pour abus de droit n'ont été modifiés après l'avis du comité de l'abus de droit fiscal et que l'administration n'était donc pas tenue d'adresser un autre document comportant une nouvelle motivation des pénalités. Par suite, en écartant le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure relative aux pénalités pour abus de droit, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la société Manpower France Holding n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Manpower France Holding est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Manpower France Holding et au ministre de l'action et des comptes publics.


Voir aussi