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Ariane Web: Tribunal des conflits C3760, lecture du 28 mars 2011

Décision n° C3760
28 mars 2011
Tribunal des conflits

N° C3760
Publié au recueil Lebon

M. Gallet, président
M. Franck Terrier, rapporteur
M. Collin, commissaire du gouvernement


Lecture du lundi 28 mars 2011
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu, enregistrée à son secrétariat le 10 décembre 2009, l'expédition du jugement du 1er décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Nice, saisi d'une demande de M. et Mme A tendant à la condamnation solidaire de la société TDF et de la commune de Cavalaire-sur-Mer à remettre les lieux en l'état dans le respect d'une servitude grevant leur propriété et à réparer leurs préjudices résultant de troubles de jouissance et de voisinage, a renvoyé au Tribunal, par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849 modifié, le soin de décider sur la question de compétence ;

Vu le jugement du 23 août 2005 par lequel le tribunal de grande instance de Draguignan s'est déclaré incompétent pour connaître de ce litige ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal des conflits a été notifiée à M. et Mme A, à Monsieur le maire de Cavalaire-sur-Mer, à la société TDF et à Monsieur le Ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi qui n'ont pas produit de mémoire ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;

Vu la loi du 24 août 1872 ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;

Vu le code des postes et des communications électroniques, notamment ses articles L. 45-1 et L. 48 ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Franck Terrier, membre du Tribunal,
- les conclusions de M. Pierre Collin, commissaire du gouvernement ;




Considérant que M. et Mme A ont acquis, le 26 juin 1980, une propriété sur laquelle avait été instituée, par convention passée les 18 avril et 26 septembre 1968 entre l'ancien propriétaire et la commune de Cavalaire-sur-Mer, une servitude pour l'implantation d'un réémetteur de télévision par l'Office de radiodiffusion télévision française, aux droits duquel vient la société TDF ; que M. et Mme A, reprochant à la société TDF et à la commune d'avoir concédé le droit d'utiliser l'installation à d'autres opérateurs et invoquant des troubles de jouissance et de voisinage, les ont assignés devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de voir ordonner le rétablissement des lieux dans le respect de la convention de servitude et la réparation de leurs préjudices ; que le tribunal de grande instance de Draguignan, après jugement avant-dire droit du 24 mai 2005, s'est déclaré incompétent par jugement du 23 août 2005 au motif que les dommages allégués constituaient des dommages de travaux publics ; que, par jugement du 1er décembre 2009, le tribunal administratif de Nice a retenu, au visa des article L. 45-1 et L. 48 du code des postes et des communications électroniques, que le litige ne relevait pas de la compétence des juridictions de l'ordre administratif et a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ;

Considérant que l'article L. 45-1 du code des postes et des communications électroniques dispose que les opérateurs de télécommunications bénéficient de servitudes sur les propriétés privées ; que l'article L. 48 du même code prévoit, d'une part, que la mise en oeuvre de ces servitudes est subordonnée à une autorisation délivrée au nom de l'Etat par le maire et, qu'en cas de contestation, les modalités de mise en oeuvre en sont fixées par le président du tribunal de grande instance, d'autre part, que le bénéficiaire de la servitude est responsable de tous les dommages qui trouvent leur origine dans les équipements du réseau et est tenu d'indemniser l'ensemble des préjudices directs et certains causés tant par les travaux d'installation et d'entretien que par l'existence ou le fonctionnement des ouvrages et qu'à défaut d'accord amiable, l'indemnité est fixée par la juridiction de l'expropriation saisie par la partie la plus diligente ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, la requête de M. et Mme A en ce qu'elle tend à la condamnation in solidum de la société TDF, opérateur privé de communications électroniques, et de la commune de Cavalaire-Sur-Mer, à supposer que cette dernière puisse être tenue à l'indemnisation des dommages prétendument causés par l'existence ou le fonctionnement de l'ouvrage, relève de la compétence de la juridiction de l'expropriation ;

Considérant que la requête en ce qu'elle tend à la condamnation in solidum de la société TDF et de la commune de Cavalaire-sur-Mer à remettre les lieux en l'état dans le respect de la convention de servitude des 18 avril et 26 septembre 1968, et se rapporte ainsi aux modalités de mise en oeuvre de cette servitude, relève de la compétence du président du tribunal de grande instance ;


D E C I D E :
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Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est compétente pour connaître du litige opposant M. et Mme A à la société TDF et à la commune de Cavalaire-sur-Mer.

Article 2 : Le jugement du 23 août 2005 du tribunal de grande instance de Draguignan est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant la juridiction de l'ordre judiciaire compétente.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Nice est déclarée nulle et non avenue, à l'exception du jugement rendu le 1er décembre 2009 par ce tribunal.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, qui est chargé de son exécution.




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