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Ariane Web: Conseil d'État 308517, lecture du 24 juillet 2009, ECLI:FR:CESSR:2009:308517.20090724

Décision n° 308517
24 juillet 2009
Conseil d'État

N° 308517
ECLI:FR:CESSR:2009:308517.20090724
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème et 3ème sous-sections réunies
Mme Paquita Morellet-Steiner, rapporteur
Mme Escaut Nathalie, rapporteur public
SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN, avocats


Lecture du vendredi 24 juillet 2009
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 août et 12 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE COUPVRAY représentée par son maire, domicilié en cette qualité à l'Hôtel de Ville à Coupvray ( 77700) ; la COMMUNE DE COUPVRAY demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 14 février 2006 du tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant, d'une part, à l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur sa demande d'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de la décision du directeur des services fiscaux de Seine-et-Marne de procéder, à compter de l'année 2000, à la réduction de la valeur locative servant à la détermination de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle ont été assujetties les sociétés du groupe SCA Euro Disney à raison des immeubles dont ils sont propriétaires sur son territoire et, d'autre part, tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser, en réparation du préjudice subi du fait de cette décision au titre des années 2000 à 2003, la somme de 2 202 583,40 euros ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Michel, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la COMMUNE DE COUPVRAY,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la COMMUNE DE COUPVRAY ;




Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la COMMUNE DE COUPVRAY accueille sur son territoire la majeure partie des infrastructures hôtelières du parc de loisirs Euro Disney ; qu'à compter de l'année 2000, le directeur des services fiscaux de Seine-et-Marne a porté à 50 % le taux d'abattement, initialement de 20 ou 30 % selon les cas, appliqué à la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 des hôtels dont la valeur locative était calculée par voie d'appréciation directe ; que la COMMUNE DE COUPVRAY a demandé au directeur des services fiscaux à être indemnisée du préjudice qu'elle estime avoir subi au titre des années 2000 à 2003 en raison de la baisse des bases de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle sont assujetties les sociétés du groupe Euro Disney pour les hôtels dont elles sont propriétaires sur son territoire ; que la cour administrative d'appel de Paris a, par un arrêt du 21 mai 2007 dont l'annulation est demandée, confirmé le jugement du 14 février 2006 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté la demande de la COMMUNE DE COUPVRAY tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 2 202 583,40 euros ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : "La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : (...) 3° (...) par voie d'appréciation directe." ; qu'aux termes de l'article 324 AB de l'annexe III au même code, pris pour l'application du 3° de l'article 1498 : "Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation. (...)" et qu'aux termes de l'article 324 AC de la même annexe : "(...) La valeur vénale d'un immeuble peut (...) être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation de ce bien." ;

Considérant, en premier lieu, que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que les erreurs commises par l'administration fiscale lors de l'exécution d'opérations qui se rattachent aux procédures d'établissement ou de recouvrement de l'impôt ne sont, en principe, susceptibles, en raison de la difficulté que présente généralement la mise en oeuvre de ces procédures, d'engager la responsabilité de l'Etat que si elles constituent une faute lourde, y compris lorsqu'une telle erreur, portant sur la détermination des bases d'imposition des impôts locaux, serait susceptible d'affecter les ressources fiscales d'une collectivité locale et qu'il n'en va différemment que lorsque l'appréciation de la situation du contribuable ne comporte pas de difficulté particulière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine non entachée de dénaturation, que la modification des valeurs locatives cadastrales des hôtels résultait de la modification de l'abattement appliqué à la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 des bâtiments compte tenu de la nature, l'affectation et la situation de ces biens au sens des dispositions de l'article 324 AC de l'annexe III au code général des impôts et que ces hôtels se distinguaient des autres hôtels de la région par des contraintes de tous ordres liées à leur appartenance au parc de loisirs majorant leur coût de revient et par l'évolution et le développement du parc Euro Disney dont ils sont indissociables, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt en ce qui concerne tant l'existence de difficultés particulières que l'absence d'une faute lourde et qui n'était pas tenue de répondre à tous les arguments de la commune, a exactement qualifié ces faits en jugeant que la procédure d'évaluation du patrimoine de la société comportait des difficultés particulières liées à la détermination du taux d'abattement et que l'existence d'une faute lourde, seule de nature à engager la responsabilité de l'Etat, n'était pas établie ;

Considérant, en troisième lieu, que la cour a suffisamment répondu au moyen tiré du détournement de procédure en énonçant qu'il n'était pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la COMMUNE DE COUPVRAY doit être rejeté ; qu'en conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;




D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la COMMUNE DE COUPVRAY est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE COUPVRAY et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


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