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Ariane Web: Conseil d'État 305226, lecture du 30 décembre 2009, ECLI:FR:CESSR:2009:305226.20091230

Décision n° 305226
30 décembre 2009
Conseil d'État

N° 305226
ECLI:FR:CESSR:2009:305226.20091230
Mentionné au tables du recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Vigouroux, président
M. Jean-Luc Matt, rapporteur
Mme Burguburu Julie, rapporteur public
FOUSSARD, avocats


Lecture du mercredi 30 décembre 2009
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mai 2007 et 14 mai 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour l'OFFICE FRANCAIS DE PROTECTION DES RÉEFUGIÉS ET APATRIDES (OFPRA), dont le siège est 201, rue Carnot à Fontenay-sous-Bois (94136), représenté par son directeur général ; l'OFPRA demande au Conseil d'État :


1º) d'annuler la décision du 15 février 2007 par laquelle la Commission des recours des réfugiés a annulé la décision du 10 mars 2006 de son directeur général rejetant la demande d'admission au statut de réfugié présentée par M. Cosmin A et reconnu la qualité de réfugié à l'intéressé ;

2º) de renvoyer l'affaire à la Cour nationale du droit d'asile ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne, notamment son protocole n° 29, ensemble le traité d'adhésion de la République de Bulgarie et de la Roumanie à l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Foussard, avocat de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES,

- les conclusions de Mme Julie Burguburu, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES ;




Considérant qu'en vertu du 2° du A de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951, la qualité de réfugié est notamment reconnue à toute personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ;

Considérant que le recours ouvert aux personnes prétendant à la qualité de réfugié a le caractère d'un recours de plein contentieux ; que dés lors, il appartient à la Commission des recours des réfugiés, devenue la Cour nationale du droit d'asile, de se prononcer sur le droit des intéressés à la qualité de réfugié d'après l'ensemble des circonstances de fait et de droit établies à la date où sa décision est lue ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Cosmin A, de nationalité roumaine et d'origine rom, s'est vu refuser la qualité de réfugié par une décision du directeur général de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES du 10 mars 2006 ; que, pour annuler cette décision et reconnaître cette qualité à l'intéressé, la Commission des recours des réfugiés s'est fondée sur les persécutions subies par M. A à raison de son appartenance à la communauté rom et du militantisme de son père dans le parti social-démocrate rom de Roumanie, consistant en des brimades et discriminations à l'école ;

Considérant qu'à la date où la commission a statué, la Roumanie était devenue membre de l'Union européenne depuis le 1er janvier 2007 ; qu'en vertu de l'article unique du protocole n° 29 annexé au traité instituant la Communauté européenne, applicable à la Roumanie en vertu du traité d'adhésion de ce pays à l'Union, vu le niveau de protection des droits fondamentaux et des libertés fondamentales dans les Etats membres de l'Union européenne, ceux-ci sont considérés comme constituant des pays d'origine sûrs les uns vis-à-vis des autres pour toutes les questions juridiques et pratiques liées aux affaires d'asile (...) ; que cet article prévoit, en conséquence, qu'une demande d'asile présentée par un ressortissant d'un Etat membre ne peut être prise en considération ou déclarée admissible pour instruction par un autre Etat membre que dans quatre cas limitativement énumérés, tenant au non respect de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par l'Etat d'origine du demandeur, à la mise en oeuvre de la procédure de prévention ou de la procédure de sanction d'une violation des droits fondamentaux garantis par le traité sur l'Union européenne ou au traitement de la demande sur la base de la présomption qu'elle est manifestement non fondée : qu'en s'abstenant de rechercher si ces conditions étaient, le cas échéant, réunies, la Commission des recours des réfugiés a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES est fondé à demander l'annulation de la décision du 15 février 2007 par laquelle la Commission des recours des réfugiés a annulé la décision de son directeur général refusant d'accorder le statut de réfugié à M. Cosmin A ;


D E C I D E :
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Article 1er : La décision de la Commission des recours des réfugiés du 15 février 2007 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE FRANCAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES, à M. Cosmin A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


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